Aujourd'hui, il a fait moche, pour un jour d'été... C'est malheureux, j'apprécie le soleil. Pourtant, les autres, eux, préfèrent quand l'humidité se fait sentir. Que l'air est un peu lourd de l'eau qu'il contient, comme si l'orage allait éclater, mais sans la foudre. Ils préfèrent car d'après eux, on ressent mieux les choses, l'odeur de la nature est plus forte et ça coule mieux dans l'organisme. C'est dans ces jours-là que je me sens différent d'eux, malgré mon éducation au milieu des loups. Malgré mon appartenance à la Meute. Je me sens un peu seul avec mes idées à moi... Les autres, les adultes et ceux qui se transforment déjà depuis quelques mois sortent à chaque pleine lune, presque tous les soirs s'ils en ont le pouvoir. Ils sont contents. Et moi je reste à la maison parce que je suis encore coincé dans ma forme humaine.
Je sentais arriver la semaine de la pleine lune, justement. Les autres étaient plus énervés alors que moi j'étais assis dans mon coin avec un livre. Depuis quelques mois, d'ailleurs, mon père ne m'adresse plus un regard. Des jeunes de mon âge et un peu moins âgés même, ont déjà eu leurs premières transformations. En tant que fils de l'Ulfric, je fais un peu naze. Thomas, Michael et Milla se transforment déjà. Thomas a mon âge, Michael, son frère est un poil plus jeune de neuf mois et Milla de dix-huit. Mon professeur, Harold, lui essaie de ne pas trop changer son comportement envers moi. Mais je vois bien qu'il est gêné pour moi et qu'il espère que je vais bientôt me transformer. Avant je jouais beaucoup avec Tom, Mik et Milla, mais depuis qu'ils se transforment, ils sont plus souvent avec les autres. Moi je me retrouve au milieu des mômes qui ne sont même pas encore pré-pubères.
Mon livre est vraiment inintéressant. Ou c'est peut être parce que je n'arrive pas à me concentrer. Je sais que nous sommes en fin d'après-midi. La lune va se lever dans le ciel qui commence s'assombrir. J'entends les trois commencer à glapir d'impatience sous leur forme humaine alors que je m'efforce de me concentrer sur ma lecture avec un froncement de sourcils. Les quelques adultes qui vont sortir à la chasse ce soir trainent dans les parages. Pourtant, moi je sais que Thomas, Michael et Milla vont rester ici. Ils n'iront pas plus loin que le fond du grand jardin derrière la maison que nous habitons presque tous ensemble. Enfin, ça tire plus sur le manoir, mais bon... Ils ne sont pas encore prêts pour la chasse apparemment. Ca ne fait pas si longtemps qu'ils se transforment, même si pour moi ça semble une éternité. Laissé sur le carreau. Je n'en peux plus.

Je claque brutalement mon livre en le refermant – suscitant le sursaut de ceux qui étaient près de moi – et je commence à faire les cents pas alors que les autres s'agitent de plus en plus. Enfin, les plus âgés sont calmes, ils ne vont pas sortir cette fois, ce n'est pas leur tour. Il faut s'occuper des jeunes. Et de moi. Mes muscles me tirent et j'accélère un peu ma marche. Je peux presque sentir la présence lourde de mon père dans le jardin. La teneur en humidité de l'air semble augmenter d'un coup. Les autres commencent à sortir.
Moi je commence à m'énerver. Toujours sur le carreau. Je pousse un grognement. Trop humain. Je jette mon livre à travers la pièce et il percute brutalement le mur opposé avec un choc sourd. Les petits gémissent. Ils doivent sentir ma tension. Je n'en peux plus ! Thomas et Michael passent à côté de moi en courant et en se chamaillant, très joyeux. Michael est le plus soumis des deux, il suit son frère partout ou presque, mais ils s'entendent très bien. Mais c'est clairement Thomas qui prend toujours les devants. Même à cet âge, on s'arrange pour établir directement le lien de domination. C'est important. Assez. Mais c'est encore assez flou pour moi. Pour l'instant personne ne m'embête parce que je ne me transforme pas. Parce que je suis le fils de l'Ulfric aussi, un peu, alors on ne se moque pas trop de moi. Enfin, pas devant moi. Ni en la présence de mon père. Surtout pas en sa présence, car même s'il fait semblant de ne pas tenir compte de ma présence, de m'oublier, il ne supporterait pas qu'on lui manque de respect à travers moi. C'est déjà une honte assez grande comme ça. Je bous à l'intérieur. J'ai l'impression d'avoir bu une boisson énergisante super concentrée en étant à jeun. Pourtant non. Je souffle fort par le nez. Je fais toujours les cents pas, contractant mes muscles jusqu'à en avoir mal. Je pousse d'un coup de coude Michael qui trébuchait maladroitement contre moi en se chamaillant avec son frère et m'attire un regard noir de ce dernier. Je lui renvoie, le défiant du regard de s'arrêter pour me faire une remarque désobligeante. Mais non, il est trop pressé d'aller dehors pour faire le fou sur ses quatre papattes. Je ronchonne à nouveau entre mes dents serrées.
Puis vint Milla. Elle me lance un regard désolée, suivant les garçons de plus loin. Je ne la regarde pas plus que ça et elle se détourne. Je suis trop en colère contre moi-même et envers les autres pour supporter sa pitié. Je ne veux pas de pitié ! Mes ongles pourtant courts s'enfoncent dans la chair de mes paumes alors que je serre les poings. Mes dents grincent. Pourquoi moi ? Pourquoi moi je ne peux pas me transformer ?! Thomas glisse la tête par la fenêtre et me fait une grimace. J'enrage d'avoir déjà jeté mon livre sinon je lui aurais balancé à la figure. C'est mon ami pourtant, je le sais, mais ce salaud le fait exprès. Il veut m'énerver encore plus ! Il va être servi ! Je m'approche de la fenêtre à grandes enjambées. Je suis déjà grand pour mon âge, j'y arrive vite. Je pourrais lui balancer mon poing dans la figure avec mon allonge. Il fait les gros yeux puis se recule brutalement. Il est un peu plus rapide que moi. Pas beaucoup, je sens la chaleur de son visage sur la peau de mes doigts rempliés. Il me refait une grimace de là où il est, mais c'est sans compter le pot de fleurs qui traine. Je l'attrape et lui lance, le touchant à l'épaule alors qu'il essayait de l'éviter. L'argile se brise sous l'impact et Thomas sautille sur place en se tenant l'omoplate avant de retourner se chamailler avec son frère, comme si la douleur était déjà passée. Un adulte me jette un regard sombre et j'ai envie d'escalader la fenêtre pour aller lui demander en face s'il a un problème avec mes manières. Au lieu de ça, avec du mal, je me retiens et me contente de lui jeter un regard noir.

Je sens mon pouls frapper contre la peau de mon cou, contre mes tempes, dans mes muscles, partout. La nuit est tombée. Les plus rapides se sont déjà transformés. Le pelage brun clair de mon père a déjà disparu dans les buissons. Les adultes le suivent. J'observe Thomas, Michael et Milla qui se transforment aussi. Deux adultes sont restés pour les surveiller. Quand même. Il est vrai que l'impulsivité des jeunes pouvaient les pousser à suivre la chasse alors qu'ils n'étaient pas encore prêts. Mais eux au moins ils pouvaient se transformer !
Je poussais un nouveau grognement. Il fallait que je me détende. Mes muscles commencent à me faire vraiment mal et j'ai l'impression d'avoir un marteau piqueur dans le crâne. Avec un gros soupir, j'escalade le bord de la fenêtre. Un peu d'air frais me fera du bien. Beaucoup de bien. Vraiment de bien. Une fois dehors, le regard doré d'une femelle me suit. Je plonge mes yeux dans les siens. Sans peur, sans inquiétude. Un peu provoquant peut être même. Elle agite la queue nerveusement, comme un coup de fouet. Détourne la tête. Un peu l'air de dire « le gamin fait encore des caprices ». Mes lèvres se relèvent légèrement sur mes dents dans un rictus colérique. Mais je sais que succomber à la colère ne ferait que la pousser à confirmer sa pensée.

Je fais de nouveau les cents pas. Je devrais vraiment me calmer. Les loups me regardent avec curiosité. Même Thomas qui pourtant jouait avec son frère un instant plus tôt. Milla, en retrait comme toujours, me jette des regards en coin en se léchant une patte. Elle doit se demander ce qui se passe. Peut être qu'ils se le demandent tous. Ou peut être que je suis le seul à me le demander et que tout le monde sait ce qui m'arrive.
J'ai toujours mal partout. Je n'arrive pas à desserrer les dents. Le regard des lupins me pèse. Je l'impression que mes jambes vont lâcher sous moi. J'ai chaud. J'ai l'impression d'être dans un hammam, entre l'humidité et la chaleur. Mes vêtements me collent à la peau. La sueur coule sur mon front.
J'en peux plus ! J'attrape le col de mon t-shirt et le lève brusquement, enlevant mon haut d'un seul mouvement sec. Mes oreilles raccrochent un peu, je ne fais pas attention. Mon torse se soulève et s'abaisse avec force mais irrégulièrement. Tantôt vite et saccadé, tantôt lent et profond. De la vapeur se forme à la sortie de mes respirations et je me dis que l'air ne peut pas s'être refroidi. Je meurs de chaud. C'est ma température qui a augmenté. Ma colère bien encore là, n'est plus vraiment tournée vers qui que ce soit. C'est juste là. D'un autre côté, je me demande vaguement ce qui m'arrive. Même si, au fond, je le sais. Ma colère fait plus office de violence sourde à présent. Je suis déjà pieds nus, je n'ai jamais aimé mettre de chaussures à moins de sortir du manoir.
Il n'y a plus, maintenant, qu'un mâle et Thomas qui me regardent. Les autres font autre chose. Enfin, font peut être semblant, j'ai l'impression, pour s'efforcer de ne pas me regarder. Je suis pris d'un violent frisson, je me penche un peu, fléchissant gauchement les jambes pour poser une main tremblante sur le sol humide. Je m'assois. Je ne sais pas comment me mettre pour ne pas avoir mal. Une ou deux larmes se mêlent à la sueur qui coule de mon front. Même mes yeux sont douloureux. Je ferme les paupières un instant. Mes oreilles entendent tout ce qui se passe autour de moi. De la respiration calme des loups au bourdonnement d'un moustique. J'ouvre les yeux, à la recherche de la dite bestiole. Je ne les aime pas. Si je l'entends, c'est qu'il est assez près pour me piquer. Trop près. Mais non. Je le vois qui tourne autour de la tête à Michael, qui est près de Milla, à l'autre bout du jardin. Le jeune loup secoue la tête pour s'en débarrasser. Je ne devrais pas l'entendre. Pas même le voir. Je gémis un peu. Je ne parviens pas à me retenir malgré le regard de Thomas qui me nargue un peu.
Ma main droite tremble violemment. Je baisse les yeux. Des poils bruns commencent à percer ma peau sur le dessus de mes doigts qui se raccourcissent rapidement. Je tourne un peu mon avant-bras alors que la chair de la paume se durcit en se contractant pour former des coussinets. Je regarde ma main qui se transforme en patte comme si c'était la plus belle chose que j'ai jamais vu. Les poils poussent le long de mon bras, puis sur mon épaule, mon torse. Ils sortent drus et mi-longs. Je sens leurs picotements. La douleur aussi, apparaît. Mes muscles ondulent. Il est trop tard pour essayer d'enlever maladroitement mon pantalon. J'ai déjà deux pattes à la place des mains. Mes os craquent. Je cris. J'ai l'impression qu'ils se brisent pour rétrécir et se ressouder différemment. Mes membres changent de forme. Je gesticule sur le sol alors que la toile de mon pantalon se déchire. J'oublie ce qu'il y a autour de moi. Je gémis, je grogne. J'ai chaud, j'ai froid. Je suis totalement recouvert de poils maintenant. Mes dents prennent plus de place dans ma bouche. Je passe ma langue qui s'est allongée dessus. J'arrive à toucher mes narines avec. Ma truffe en fait.
Je me secoue un peu. Tombe sur le côté. Mes oreilles se dressent. L'appendice qui a poussé en bas de mon dos s'agite.
Je suis un loup ! Je suis un loup ! J'ai envie de sautiller partout. Je m'emmêle les pattes et tombe. J'entends le rire de loup de Thomas et tourne brusquement la tête vers lui. Il se tait. Puis vient me pousser du museau. Et rit de nouveau en me voyant m'écrouler. Je me redresse tant bien que mal et le pousse à mon tour, en tombant sur lui. La colère et la hargne me poussent à vouloir lui rentrer dans le lard, comme on dit. Mais je suis encore trop maladroit. Pourtant, j'essaie. J'essaie encore et encore, ce qui ne fait que rire d'avantage l'autre loup. Finalement, tout le monde me regarde maintenant. Milla agite la queue joyeusement. Finalement, après d'autres tentatives, j'arrive à tenir debout et à marcher, même à trottiner. Ca vient doucement. Je vais pouvoir me libérer sur Thomas.

Après une petite heure, je contrôle à peu près mon nouveau corps. Je suis tout content et la colère contre mon ami est toujours là, à force d'essayer de lui faire du mal parce qu'il rit de moi, je vais y réussir. Mais d'un autre côté, je n'ai jamais été aussi heureux de toute ma vie ! Milla est venue se frotter contre moi et je lui ai donné une grande léchouille sur le museau. Elle a semblé contente.
Et puis Thomas est revenu à la charge, me poussant plus fort qu'au début. Je me suis retourné brusquement vers lui sans avoir bougé de plus de cinq centimètres et j'ai fait claquer ma mâchoire près de son museau. Il a reculé en sautant mais ne s'est pas trop écarté. Je le regardais un moment, lui signifiant de ne pas recommencer puis m'intéressait à une souris qui couru à côté de moi. Incapable de vraiment me concentrer, tellement tout bourdonnait dans ma tête. La colère, la curiosité, je ne savais à quoi donner cours. Des crocs pointus vinrent me mordiller l'arrière de la cuisse alors que j'essayais de voir où allait le petit rongeur et je me retournais d'un coup, extrêmement rapide et avec quelques pas percutais violemment l'importun qui avait osé. Thomas, encore. Je grondais alors que la force de l'impact l'avait projeté au sol. Mes oreilles étaient penchées en arrière et mes babines se retroussaient sur mes crocs brillants. Je sentais mon poil doucement se hérisser le long de ma colonne vertébrale. La colère avait gagné sur la curiosité. Il se redressa et essaya de s'approcher, montrant clairement qu'il voulait encore m'embêter. De nouveau, je fis claquer ma mâchoire et loupais de peu son oreille. Il commença à me tourner autour et je suivais le mouvement. Les adultes avaient levé la tête pour nous regarder avec curiosité et Milla et Michael s'étaient prostrés contre eux. Je savais que personne n'interviendrait. C'était un combat de domination. Mon premier. Il ne fallait pas le louper.
Un grondement sourd s'échappait continuellement de ma gorge et je ne quittais pas des yeux Thomas. Il était mon ami, mais je savais que ça devait se faire. Et mieux valait le faire maintenant. J'étais un loup plus grand que lui, mais ça ne voulait pas dire que j'allais gagner. Même si ça jouait en ma faveur. Sans compter que je suis le fils de l'Ulfric... Mais ça, pour l'instant, ça ne comptait absolument pas. Je devais faire mes preuves comme tout le monde et je le savais.
Je me ramassais un peu sur moi-même et bondis en premier. Directement, j'essayais d'attraper la gorge de mon adversaire entre mes crocs. Il esquiva, mais une de mes pattes lui griffa le flanc, l'autre entailla la peau derrière son oreille. Il se contorsionna pour essayer le me mordre à son tour, juste à la naissance de la cuisse, dans la chair tendre de l'aine. Je lui donnais un coup de patte arrière dans le museau pour le repousser et m'éloignais un peu avant de revenir très vite lui porter un nouvel assaut.

La bagarre continua encore plusieurs minutes avant que, dans une dernière attaque, je parvienne à attraper sa gorge entre mes crocs et le maintint au sol pendant quelques instants. Ses muscles se crispèrent brièvement puis il se détendit complètement. Je lâchais ma prise et il se fit basculer sur le dos. Je le poussais du museau avant de relever la tête.
Entre temps, la troupe qui était partie à la chasse était revenu. Je croisais le regard de mon père. Un gibier était ensanglanté à ses pattes. Les autres loups me regardaient. L'Ulfric s'approcha de moi et frotta son flanc contre le mien avant de me donner une bourrade et me contourna pour retourner au trophée de chasse. Il arracha la tête de l'animal et la broya entre ses crocs sous le regard des autres et se régala de la cervelle avant d'éventrer le corps et de plonger sa tête dans les entrailles pour se régaler. Après un instant, il redressa la tête et tourna son poitrail rouge de sang vers moi. Je braquais mes yeux sur lui en approchant puis baissais la tête vers le cadavre sans une hésitation et plongeais mon museau dans le sang.
Je refermais mes crocs sur le cœur et une cascade de liquide rouge s'écoula dans ma gueule.

Je ne sais plus si cela s'est déroulé en soirée ou dans la journée. Mais c'était très certainement en soirée, en y repensant. Mais au fond, cela n'avait pas tellement d'importance... Cela n'avait même aucune forme d'importance que ce soit. Ce qui commence en revanche, à être notable, c'est le fait que presque l'ensemble de la Meute était rassemblée en une pièce. C'était une des plus grandes pièces du manoir. Nous n'étions pas très nombreux, à vrai dire... Un peu plus d'une dizaine d'adultes, tout au plus. Et quelques enfants. Il n'y en avait qu'un parmi eux qui se transformait déjà, les autres étaient trop jeunes... Et ne se transformeraient peut être jamais. Jamais en entier... Cela faisait plusieurs années que les enfants de la Meute arrivaient de moins en moins à supporter la douleur de la première transformation... Nous assistions alors impuissants à leur mort... Certains, surtout les femelles, perdaient espoirs et ne voulaient même plus procréer. Mais sans enfants, la Meute allait s'éteindre doucement... À moins que du sang neuf ne nous arrive, mais les derniers loups à avoir foulé notre territoire n'étaient que de passage ou ne se révélaient pas dignes de rejoindre nos rangs. Ou encore, ne voulaient simplement pas se mêler à nous.
Mais pour l'instant, nous coulons encore des jours heureux. J'étais moins même en train d'occuper les enfants avant de dîner. Ils étaient assez excités, surement sentaient-ils l'heure du repas arriver. Ou bien n'était-ce que leurs sens qui commençaient à s'aiguiser qui parvenaient à déceler la bonne odeur de nourriture qui commençait à réveiller les ventres même des adultes. Peu importe. J'aime beaucoup jouer avec les enfants. Jouer, à cet âge, est aussi une forme d'apprentissage. Ce qui permet à la fois d'occuper l'esprit et de s'instruire. Tout est plus facile quand on est enfant. Je me souviens même de ma propre première transformation... Je ne dis pas qu'elle fut plus facile que les suivantes, loin de là, mais l'acceptation subite de mon père et mon premier combat de dominance furent bien plus simples à l'époque. Mon père finit par reprendre son comportement habituel et les autres combats furent plus rudes. Mais au moins, à présent, Thomas – et donc Michael qui le suivait toujours partout – et moi étions devenus encore plus proches. Dans le langage humain, nous aurions pu nous qualifier de meilleurs amis. Mais ici, dans la Meute, nous étions plus que frères. Actuellement, il se chamaillait avec son frère, comme à son habitude. Milla était derrière moi. Je sentais la chaleur de son corps dans mon dos, la rondeur de ses seins contre ma peau. Elle avait posé son menton sur mon épaule et souriait en essayant de jouer avec les petits par-dessus mon épaule. Elle était pour l'instant ma compagne, bien que rien ne soit réellement officiel au même titre que chez les humains. Nous sommes ''ensemble'', sans pour autant être en couple. Nous aimons chacun la compagnie de l'autre et cela nous suffit amplement. Certes, cela fait très longtemps que nous vivons ce genre de relation, mais cela me va très bien comme ça.

La télévision diffusait les informations et émettait un bruit de fond aux conversations et jeux des loups présents. Différentes choses étaient annoncées par le présentateur humain et je n'écoutais qu'à moitié. Je n'avais jamais tellement aimé la télévision de toute manière. Ce n'était qu'une source d'ennuis et de ragots tous moins importants les uns que les autres. Si une chose réellement importante, et vraie, devait arriver, nous le saurions de manière beaucoup plus sûre dans la rue ou dans les journaux écrits. Je n'avais vraiment aucune confiance en cette boite à images et encore moins dans les palabres des journalistes qui ne faisaient que chercher les records d'audience. Oui, j'en savais assez sur leur manière de faire pour ne pas l'apprécier. Jamais, au grand jamais, je ne me serais permis de juger quelque chose sans en connaître plus de détails.
Quelqu'un monta sensiblement le son pour avoir les résultats sportifs du jour puis on laissa le reste de l'émission se dérouler sur le même volume jusqu'à ce que les informations deviennent moins centralisées, passent au national, voire international. Quelqu'un d'autre augmenta encore le son. Après quelques nouvelles qui furent finalement sans trop d'importance, je redressais la tête. J'avais senti une sorte d'excitation nouvelle dans la Meute entière. Milla me regarda sans comprendre, ses sens n'étaient pas aussi aiguisés que les miens sous sa forme humaine. J'avais senti certains des loups se tendre. Je regardais alors les images qui défilaient sur l'écran. C'était des rediffusions du procès qui se déroulait depuis quelques jours. Certains d'entre nous avaient approché ces gens qui passaient à la télévision, d'autres n'étaient tendus que parce qu'il s'agissait d'un procès qui faisait beaucoup de bruit. Ceux qui faisaient partie de la première catégorie se tendaient car ils savaient que des êtres surnaturels étaient impliqués sans que les humains ne le sachent encore. Les autres parce qu'ils savaient que ce genre de procès pouvait être parfois exaltant. Au fond, je faisais partie de la seconde catégorie, car ceux qui en faisaient partie savaient tous ce que savent ceux de la première. Aucun secret parmi nous. Seulement, la seconde catégorie en savait plus à propos des procès que la première. Je venais d'avoir mon doctorat en droit, alors, il allait de soit que j'étais un peu au courant.
Je regardais soudain avec attention, continuant à jouer distraitement avec les enfants sans pour autant les regarder. On avait encore augmenté le volume. Même les humains filmés semblaient très excités. Je fronçais les sourcils. J'avais comme un mauvais pressentiment. Un des petits essaya de capter à nouveau mon attention et je baissais la tête pour m'occuper de lui avec plus d'entrain et le fit même rire.

C'est à ce moment-là qu'un murmure parcouru notre assemblée. Milla octa dans mon dos et je me redressais de nouveau. Mon père, en plus de tout cela se leva d'un bon, dégageant une colère et une hargne pure. Il renversa la table sur laquelle reposait l'appareil et grogna à la manière du loup. Les poils de mes bras se hérissèrent en sentant sa puissance effleurer ma peau et tous les membres de la Meute se recroquevillèrent les uns contre les autres dans un silence complet. Un silence uniquement brisé par les gémissement des enfants autour de moi. Tous n'osaient plus bouger.
L'Ulfric grogna et fracassa la télécommande en éructant des grossièretés. Moi je captais enfin la voix du journaliste qui répétait ce qui avait soulevé une telle rage. Les vampires s'étaient révélés. J'en restais coi un instant. Mais mon père explosa de plus belle, détruisant la télévision. « CES INCONSCIENTS ! ILS N'ONT PAS IDEE DE CE QU'ILS DECLENCHENT ! TOUJOURS TOUJOURS ILS ONT ETE COMME CA ! LES AUTRES ILS N'Y PENSENT PAS ! LES HUMAINS VONT LES ADULER ! MAIS LES AUTRES ? Il se tut un bref instant avant de reprendre, les autres s'enfonçant autant qu'ils pouvaient loin de lui. Il postillonnait et commençait à se transformer tellement son ire était intense... JE VAIS LES MASSACRER ! LES LACERER ! LES DEVORER ! CES FILS DE PUTAIN DE SANGSUES! »
Sans réfléchir, je donnais un des petits qui s'était accroché à moi à Milla et me levais rapidement. Le temps paru s'arrêter un instant alors que tous les regards, sauf celui de mon père, se tournaient vers moi avec une peur et une incrédulité complète. Ils semblaient dire : « Mais tu es fou ! Tu vas te faire tuer ! » Mais je n'y fis pas attention, le temps reprit son cours normal et je m'avançais avec une rapidité surprenante aux yeux des loups bêta qui me regardaient. Je me positionnais devant mon père, mes yeux avaient tournés à l'or, comme les siens, et je plongeais mon regard dans ce métal en fusion. Un grognement puissant jaillit de ma gorge à l'instant même où lui-même en poussait un. Je ne saurais dire lequel des deux fut le plus fort mais nous redevînmes silencieux, nous défiant du regard. Ma main se posa sur son épaule et serra, avant de le forcer à s'asseoir alors que je pliais moi-même les genoux pour rester à sa hauteur.
Une fois assis, j'ouvris la bouche pour parler. Pour lui dire ce que je pensais, pour lui dire pourquoi je m'étais levé en face de lui. Mais sa main droite vola dans ma direction. Ses ongles étaient à moitié transformés en griffes et il me frappa violemment d'un revers. Je dus tendre le bras en arrière pour ne pas m'écrouler sous la force du coup et du sang commença à couler de mon arcade. Je sentais les battements de mon corps frapper fort dans la blessure et un mal de crâne me prit. Je baissais les yeux et la tête en signe de soumission. C'était mon père. Je ne le défiais pas. C'était l'Ulfric, en aucun cas, à cet instant, je ne lui lançais le Défi Ultime. Non. Jamais. Je ne voulais pas prendre la place de mon père. Je ne le tuerais pas dans un combat à mort. Il me repoussa, je me laissais tomber en arrière cette fois-ci. Je ne bougeais plus mais je pris cependant la parole.
«  Père, ne vois pas en mon acte la moindre rébellion ou le moindre défi. Je ne fais que protéger la Meute en tentant d'arrêter ta colère meurtrière... S'attaquer aux vampires ne feraient qu'empirer notre situation. Premièrement parce que cela réduirait considérablement nos rangs, et deuxièmement car cela entrainerait à n'en pas douter la révélation au monde de l'existence des lycanthropes. Dans les légendes et contes humains, le loup n'est pas bien vu, Père, les hommes ne risquent pas de nous accueillirent à bras ouverts... »
Je relevais les yeux vers lui. Du sang coulait dans mon orbite gauche et piquait ma rétine mais je ne levais pas la main pour l'essuyer. L'Ulfric me regarda un long moment, puis se redressa. Je restais sur le sol, sur le dos, comme j'y étais tombé. Il fit un pas en avant, regarda les autres loups qui n'osaient pas bouger mais n'arrivaient pas à détacher leur regard de la scène. Il se pencha vers moi, son visage tout près du mien. Alors que mes yeux étaient redevenus bleus, les siens étaient toujours de cet or du loup. Sa lèvre supérieure se retroussa avec un grognement puis il attrapa le haut de ma chemise pour me redresser avant de m'envoyer voler à travers la pièce.
Même les enfants n’eurent pas le courage de pousser un gémissement. Je me relevais à quatre pattes alors que mon père quittait la pièce. J'essuyais enfin mon œil. J'avais plusieurs côtes fêlées. Milla s'approcha doucement de moi avec un des enfants dans les bras qui n'avait pas voulu la lâcher.
Je savais bien que la télévision est un démon.

Cela fait cinq ans que j'ai quitté Chicago. Chicago et ma Meute. Et mon père. Et Milla. Il n'y a que Thomas qui est venu avec moi. Michael est mort peu avant que je ne me décide à partir. Il est tombé sur un mauvais cabot... Thomas l'a vengé avec une colère et une peine que je ne saurais même imaginer. Même moi, je n'aurais pas voulu me retrouver entre ses mains. Thomas peut être d'une vicieusetée et d'une sournoiserie quand il veut... Et il est très doué pour faire souffrir les gens qu'il veut voir souffrir. Mais il est extrêmement fidèle. Lorsque l'on est son ami, on peut compter sur lui dans n'importe quelle situation et n'hésitera pas à se mettre en danger pour vous protéger. Certes, il est un peu hyperactif et spontané, mais c'est ce qui fait de lui qui il est.
Et il doit éprouver plus de loyauté pour moi que pour mon père car il m'a suivit jusqu'en Louisiane. Peut être aussi ne voulait-il simplement plus rester dans la ville où il avait perdu son frère. Je ne lui ai pas demandé, je ne lui demanderais jamais. Il fait ses choix comme il l'entend et ça ne me dérangeait aucunement qu'il vienne avec moi.
Nous sommes donc devenus deux cabots sans Meute. Même si, jusqu'à maintenant, je me considère encore un peu comme appartenant à la Meute de Chicago, peut être parce que je ne connais pas d'autre meute, que j'y suis né et que Thomas est encore avec moi... Mais je n'ai plus l'autorité de mon père au-dessus de moi... C'est quelque chose qui a beaucoup changé. Enfin, cela m'a assez marqué. En effet, les rapports avec mon père n'ont pas toujours été forcément très harmonieux, mais depuis la Révélation, ça ne s'était pas arrangé. Il valait mieux partir. Je me dis pourtant que Thomas, et je le vois bien, se demande pourquoi je ne suis pas resté pour défier l'Ulfric ou bien pourquoi il n'y a pas plus de loups qui m'ont suivi... Je n'en sais rien, en ce qui concerne la seconde question. Je ne veux pas le savoir, je ne me le suis même pas demandé. Ce sont des loups de la meute de Chicago, ils vivent sur ce territoire, ils sont assez grands pour choisir tous seuls. Ce n'est plus vraiment mon problème. J'espère juste que tout se passera bien pour eux. Je ne pense pas que mon père refera la même erreur que le jour de la Révélation. Surtout que maintenant les humains nous connaissent aussi et qu'ils ne nous aiment pas. Il serait trop dangereux de s'exposer encore plus. C'est sans parler des vampires...

Mais maintenant, je suis loin de Chicago. Ici il fait chaud, on sent la magie partout et les ouragans sont fréquents... Ca change complètement. Mais le changement est bon parfois...
Et je fais de nouveau mes valises. Je dois partir pour Shreveport. Une autre ville. Mais toujours en Louisiane. Toujours en Louisiane mais avec une meute cette fois. C'est justement cela qui m'emmène dans cette ville. Une meute. Mais pas pour la rejoindre. Pour enquêter. Cela fait quelques temps que le Père Loup s'inquiète de la situation à Shreveport. Les cabots s'y multiplient sans que l'Ulfric n'y fasse rien et les choses dégénèrent parfois. À croire que la Meute laisse les chasseurs et la BRIS se charger des loups qui n'en font qu'à leur tête. À croire que la Litanie a été oubliée dans ce coin là. On ne peut pas tolérer ça. Non. Je dois donc aller enquêter. Je finis ma valise. Je n'ai pas grand chose au fond. Mais j'espère pouvoir me poser enfin quelque part pendant un bon moment. La vie de Meute me manque. Cela fait peut être un peu faiblard à l'oreille d'un humain, mais la vie de Meute, ce n'est pas rester chez papa et maman. C'est un peu de ça, certes, mais tellement plus à la fois. Cela serait impossible à expliquer à quelqu'un qui n'a pas un animal vivant en communauté hiérarchisée à l'intérieur. Et encore, certains autres animaux ne pourraient pas comprendre non plus.
Thomas vient de rentrer et s'est jeté sur mon lit à côté de ma valise. Sur le dos, il me regarde à l'envers avec un grand sourire. Je me demande ce qu'il a encore fait de sa journée, mais il est presque certain qu'en fait je n'ai pas envie de savoir. « Alors, encore une valise?!
— Oui, tu vois bien. Tu viens?
— Tu veux dire que tu m'invites avec toi faire des enquêtes spéciales pour le big boss, alors que j'ai une multitude de super jouets ici ?
— Tu as raison. Reste ici, c'est mieux. »
Il attrapa un oreiller et me l'envoya en rigolant avant de se relever pour éviter que je ne prenne le dit oreiller pour l'étouffer sur place. Il était vrai que s'il y avait bien une chose à reprocher à Thomas, s'était son manque de discrétion. Oh, il pouvait très bien garder sa nature lupine secrète, mais on était toujours obligé de le remarquer quand il arrivait quelque part. Et si ma mission nécessitait de la discrétion, il valait mieux qu'il ne vienne pas ! En plus, comme il l'avait si bien dit, il avait plein de choses pour l'occuper ici. Je ne doutais pas que ça voulait dire des femmes et de la nourriture, mais il y avait bien d'autres choses qu'il aimait dans ce bas monde.
Pourtant, j'aurais aimé qu'il me dise qu'il voulait venir avec moi. Il était certain qu'il allait me manquer mais que j'allais perdre aussi du même coup un soutien qui pouvait s'avérer non négligeable sur le territoire d'une nouvelle meute... Surtout si on découvrait que je venais enquêter. Et surtout sur ce que les résultats de mon enquête pourraient entrainer... Je ne sais pas ce que le Père Loup attend de moi. À part l'enquête et jusqu'où tout cela pourra aller... Je sais bien que ce n'est pas malin d'accepter de se lancer dans ce genre d'entreprise quand on ne sait pas ce qui nous attend, mais je ne pouvais dignement pas refuser l'honneur même d'être choisi pour une enquête de cette ampleur.


Shreveport.
Je déposais ma valise à mes pieds alors que je cherchais les clés de mon nouveau chez moi dans la poche de ma veste. Coven Garden. Il n'y avait presque aucune odeur de métamorphe dans ce quartier. Un bon quartier, bien tenue, tout beau et tout frais mais la magie transpirait de certaines maisons... J'avais cru vaguement comprendre que le quartier lycanthrope se situait à Southampton, mais je n'allais certainement pas y habiter. Ce n'est pas que je ne voulais pas me mélanger avec eux, de toute façon j'allais devoir les côtoyer pour l'enquête, c'est juste qu'un avocat du Capitole ne va surement pas habiter dans ce genre d'endroit. En plus, j'ai largement les moyens de me payer une habitation par ici.
Un coup d'oeil à la rue et je poussais la porte pour entrer. Il y avait encore des meubles dans la maison. Bien. C'était ce que j'avais demandé. Je poussais un profond soupir. Une grande maison pour moi tout seul. Et un silence de mort. Je m'étais habitué à avoir le bruit presque constant que faisait Thomas quand il gesticulait partout. Je me dis aussi que j'allais devoir faire attention à mon alimentation. Au moins mon alimentation humaine. Car avant c'était toujours Tom qui me faisait à manger. Aaah, j'ai l'impression d'être un divorcé perdu sans sa femme ! Que d'histoires ! Du moment que je nourris bien le loup, il ne devrait pas y avoir de problème. Ca je peux faire. Enfin, ça ne devrait pas poser de problème, vu ce que j'en sais, l'Ulfric de m'embêtera pas si je chasse sur ses terres.
J'allais poser ma valise dans la chambre et m'assis sur le bord du lit. Ce soir, j'irais voir le fameux Ulfric, Liam Danvers, pour me présenter à lui. Cela fait partie des règles, venir se présenter au chef du territoire sur lequel on entre. Quoi que l'on puisse penser du chef en question. Il était impensable alors que je viens pour faire respecter la Litanie que moi même je ne m'y plie pas. Ne serait-ce que pour quelque chose comme se présenter à l'Ulfric. Ca semblait peut être banal, mais c'était primordial. Je me laissais aller en arrière en faisant grincer la protection qui recouvrait le matelas et fermais les yeux un instant. La journée avait été longue. Je n'avais qu'une envie, me transformer en loup et aller courir sous les bois humides. Mais il fallait attendre la tombée de la nuit. Et que je me sois présenté.
J'avais l'intime intuition que cette enquête allait être longue et si peu palpitante car elle ne m'apprendrait que mieux ce que je savais déjà : la meute de Shreveport n'avait plus aucune autorité. Si le Père Loup m'envoyait, de toute façon, ce n'était pas parce qu'il avait des doutes. C'était parce qu'il savait. Alors je me demandais pourquoi. Pourquoi avoir besoin d'envoyer quelqu'un s'il savait ? Est-ce qu'il pensait qu'en voyant l'état de cette meute je défierais l'Ulfric ? Est-ce qu'il y pensait ou bien est-ce qu'il l'espérait même ? Je ne pouvais pas savoir. Mais il était certain que je ne pourrais pas laisser une meute dénigrer la Litanie comme ça. Je ferais forcément quelque chose. Il est plus ou moins toléré que les cabots ne La respecte pas à la lettre car ils ne vivent pas en communauté et peuvent ne pas avoir reçu d'éducation sur le sujet, mais une meute entière, et un Ulfric par-dessus le marché ! Non, ce n'est pas tolérable. Notre race semble déjà bien assez décousue aux yeux de tous, ce n'est pas pour que nos symboles d'unité et de règles soient piétinés...


Je n'eu aucun mal à trouver où était Liam. Liam Danvers. Dans ma tête, il était déjà en quelque sorte un Ulfric déchu. Déchu par le simple fait qu'il ne faisait pas régner la loi sur son propre territoire. Il était même encore étonnant que d'autres loups n'ai pas commencé à mettre leur odeur par-dessus la sienne. Pourtant, je n'en montrais rien alors que deux lycans m'accompagnèrent jusqu'à celui qui se réclamait être leur chef.
Quelques minutes après, et de nombreux regards curieux, je me retrouvais donc en face de lui. Liam Danvers. Ulfric de Shreveport. Il était grand, presque autant que moi. Ses cheveux étaient du même brun/blond que les miens. À part les traits du visages, on aurait presque pu nous croire de la même famille. Il était un peu plus âgé aussi. Je le regardais un long moment. Je jaugeais son aura d'alpha, son aura de chef. Tout comme il devait être en train de jauger la mienne. Combien de cabots alpha avait-il croisé depuis qu'il était Ulfric ? J'aurais aimé le savoir. Se demandait-il si j'étais une menace ou bien s'il allait faire comme avec les autres, me laisser vaquer à mes occupations sur ses terres ? Me laisser enfreindre la Litanie, même, si je l'avais voulu ?
Je plongeais mes yeux dans les siens. Allait-il se détourner le premier ou bien allions-nous rester ainsi toute la nuit ? S'il tenait assez longtemps, je me détournerais de moi-même, je n'avais aucunement l'intention de le défier. Pas aujourd'hui en tout cas. Et pas dans les jours prochains.

Finalement, après un moment. Je détournais les yeux. Bien. Il avait au moins passé le premier test. Même si j'avais pu tenir plus longtemps, je ne désirais pas que ça s'éternise, sinon le combat serait devenu de plus en plus inévitable. Et puis je commençais à m'ennuyer. J'avais bien perçu la tension grandissante des autres loups présents qui soudain s'était libérée quand j'avais détourné les yeux. Danvers devait encore avoir quelques membres qui lui étaient fidèles. Mais fidèles à quoi ? Ce n'était pas un chef qu'ils avaient. Je me retins de pousser un soupir et relevais la tête.
« Je suis venu à Shreveport pour quelques affaires, tant privées que professionnelles et je compte rester sur les terres de l'Ulfric pendant une durée indéterminée. Je suis éduqué et respectueux de la Litanie et je ne devrais apporter aucun problème en cet endroit. Du moins, aucun problème qui enfreindrait les lois des loups.  »
Je le regardais encore un instant, de manière plus approfondie, comme pour le sonder, voir comment il réagissait à mes paroles qui contenaient tout de même quelques allusions. Ses narines se dilatèrent un instant et il finit par hocher la tête. D'un geste de la main il me congédia. Il avait très certainement noté mentalement mon odeur pour qu'aucune équipe ne soit envoyée à mes trousses. Bien que je doutais qu'il y ai une troupe très active qui chasse les cabots...
Je retournais alors chez moi... Il allait tout de même falloir que je sois discret, pour ne pas avoir plusieurs loups qui me tombent dessus, mais je ne pouvais pas laisser ce territoire de meute être la proie de lycans non respectueux de la Litanie...