Traits de caractères « Hey Jo’, j’crois que je suis folle. » Son regard bleu se fixa dans l’œil vitreux de son interlocutoire alors que d’une main elle faisait rouler doucement la bouteille de bière vide. Le silence ne dura que quelques instants, quelques instants où Anja essayait de prouver la gravité de sa phrase. Et puis soudain elle se mit à rire, d’un rire cristallin, d’un rire de folle. Pourtant elle ne l’était pas, en tout cas d’après les médecins. Elle était juste … dérangée, fatiguée, délurée. A première vue Anja est le genre de fille dont on se demande pourquoi elles sont dans la rue, avide de culture, maligne et intelligente, Anja jouait avec les mots comme certains avec les couteaux. Elle les aimait ces mots, lentement elle apprit à s’y accoutumer, à se les approprier et maintenant à son bon vouloir, Anja pouvaient les cracher avec violence ou bien au contraire, vous sortir des phrases douces et caressante comme une flamme. Malgré cela, la Norvégienne était lunatique à l’extrême, passant d’un optimisme à tout épreuve à une mélancolie que rien ne semblait pouvoir arrêter. D’un tempérament bohème, Anja déteste les conflits mais osera tout de même toujours élever sa voix si elle pense que ses opinions sont justes. Cependant, Anja n’est pas bavarde pour autant, observatrice avant tout, elle pourrait passer de nombreuses minutes à vous regarder sans pour autant vous adresser la parole essayant de scruter de ses yeux bleus le moindre détail, aussi insignifiant soit-il. Sa confiance ? Elle est inexistante, l’acquérir semble chose impossible. C’est comme une bête sauvage qu’on apprivoise, mais qui a un geste maladroit vous saute à la gorge sans vergogne, bien Anja c’est un peu une bête sauvage s’agrippant à sa satané liberté qui l’empoisonne et qui la fait crever à petit feux.

D’un sourire à tout épreuve, Anja possède ce charme naturel, mais maladroit, elle ne sait pas s’y prendre avec les autres et n’essaye même pas à vrai dire. Elle a déjà assez affaire avec son propre esprit. Il la tourmente, jour après jour. Parfois c’est un brouhaha, parfois une voix claire et directe. « Vas y fais le ». Parfois elle refuse, elle crie que non jamais elle ne ferait des insanités pareilles et se met à chanter comme pour faire taire ces voix qui chuchotent dans son crâne. Et puis un jour, elle accepte et suit les ordres docilement, alors elle craque une allumette. Juste une, pour voir la flamme doucement se consumer en une danse macabre et si agréable. Et puis elle en allume une seconde et la jette. Voiture, maison, tout passe et tout se détruit par le feu. Souvent, la jeune humaine regarde son spectacle sans véritablement prendre conscience de ce qu’elle a fait. Non elle n’est pas folle, elle n’est pas pyromane, elle suit juste les ordres malsains de son esprit.

Occupation nocturne Anja elle voyage. Gitane pour certains, paumée pour d’autres, un peu des deux en fait. Depuis qu’elle est partie de chez elle, la Norvégienne ne vit pas sur l’or et réussit à vivre avec peu et souvent obtenu par de moyens pas très légaux. Prostitution, calice pour vampire elle accepte les dérives des autres pour un hamburger ou une nuit au calme. La liste de ses larcins ne s’arrête pourtant pas là, vol, escroquerie, hackeuse … Tout est bon danslcochon pour un billet froissé. Elle compte sur la générosité des uns et sur le fric d’autre. Parfois, elle fait quelques petits boulots comme serveuse ou travailler dans un hôtel miteux, mais jamais la jeune femme arrive à se fixer. Le plus souvent, Anja ne reste que quelques semaines dans une même ville. La plupart elle suit d’autres paumés et l’été elle parcoure les festivals de musique-junkie-hippie qu’elle aime tant. De son temps libre, Anja ne fait que boire ou se droguer à tout ce qui peut passer à sa portée. Hero, V, exta, cocaïne, on se demande comment elle fait pour tenir debout. Parfois elle en a marre de partir comme ça à la dérive, parfois elle essaye de croire qu’elle peut réussir à avoir un avenir, aussi minable soit-il et qu’elle ne crèvera pas à même le trottoir dans quelques années. Mais rien ne dure, il y a juste ces feuilles de papier froissées qu’elle garde toujours avec elle. La vérité c’est qu’elle écrit, elle se nourrit de littérature et de paroles de chansons comme d’autres de Coca.

Manies, habitudes & goûts
◊ Par son statut de marginale, Anja traine partout, que ce soit dans les marais, dans les cimetières, sur/sous les ponts ou dans une maison abandonnée, rien ne semble surprenant.

◊ Plus jeune, Anja fut la victime de sorts de possession qui ont plus ou moins marchés sur elle. Etrangement, le fait d'avoir du sang de sorcier dans les veines lui permit de se défendre plus ou moins. Mais la jeune femme en garde des sequelles importantes : perte d'absence et de contrôle, les esprits qui la côtoie désormais ne laisse plus son esprit en paix et ne semble pas prêt à la laisser tranquille

◊ Bien qu’elle garde des traces psychologiques, une partie de son mal peut être guerri par un sorcier, cependant elle leur crache littéralement à la gueule et ne veut plus jamais en approcher un. Si elle n’a pas de don de médium comme pour voir les auras, elle ne cache pas son dégout pour eux.

◊ Droguée jusqu’à la moelle, du joint au V, tout est bon pour perdre pied. Elle a risqué plusieurs fois l’overdose, est une habituée des urgences, des refuges pour sans domicile et de la police. Son casier est pire qu’un roman d’Oscar Wilde (je vous l’avoue, le style est moins cool.).

◊ Pour Anja, la musique, l’écriture et la liberté sont tout pour elle. Elle se passionne pour les livres, même si elle n’a pas les moyens de s’en offrir et il lui arrive de fréquenter les bibliothèques. Elle danse partout, presque en transe. On la déjà traité de folle, elle s’en moque. Anja fait ce qui lui plait, y compris insulter chaque personne qui ne lui convint pas.

◊ Calice, prostituée, souffre-douleur, pour un peu de fric, elle endurerait tout.

◊ Toujours franche, Anja n’est pas du genre à cacher ses faiblesses. Tout est à fleur de peau, si bien qu’on pense la briser facilement. Du rire au larme, elle y passe en une seconde sans jamais arriver à trouver la moindre stabilité. Pour ça, elle a besoin des autres et s’y refuse.

◊ Malgré tout ce qui lui est arrivé, Anja continue à croire en une force supérieure, un Dieu. Il lui arrive de fréquenter les églises et elle connait la bible par cœur.

◊ Soif de connaissance, elle apprend vite. Ce qui la passionne en ce moment c’est la mécanique et la littérature américaine.

◊ Elle oscille parfois entre se faire mordre par un vampire ou un loup-garou. Juste pour croire que ça règlera tous ses problèmes. Mais Anja n’est jamais allée jusqu’au bout. Malgré tout, elle n’a aucun problème avec eux aussi cinglés soient-ils.

◊ Incapable de se défendre avec sa force inexistante ou avec une arme à feu, elle garde toujours une lame sur elle et si elle n’est pas forte, elle reste agile et rapide.

◊ Elle a peur de l’eau, de la foule, du silence. Criez, écartez vous, brulez.

Convictions Un grand choc. Pour elle et pour sa communauté. Les dieux vivants n’étaient que de vulgaires sorciers qui jouaient à leur guise avec leurs corps et leurs esprits. Les prophètes n’avaient jamais existés, chimères irréelles qui ont très vite disparu dans la fumée épaisse et dans les flammes ardentes. Savoir qu’elle a du sang de sorcier la dégoute d’elle-même. Mais une fois la vérité assimilée, il fallut se faire à cette nouvelle vie, à cette société qui avait changé et Anja y plongea sans vraiment sans soucier. Elle comprend les marqués et se dit souvent que souvent elle aurait put dépasser la limite. Fascinés par tous les autres, elle ne semble en exécrer aucun et semble penser qu’après tout chacun à sa place ici.

Signes particuliers Son corps, c’est une toile déchiquetée par les morsures, par des traces de canines et les piqures. Elle ne s’en vante pas et se dégoute de ce qu’elle peut lui faire subir. Parfois il lui arrive d’avoir d’être brulée à certains endroits sans même savoir pourquoi.

Anja est hantée. Du moins si on peut appeler cela comme ça. Depuis un sort, des esprits tourmente son esprit et son psychique, lui faisant croire qu'elle est folle.

INSANE

« Pardonnez moi mon père, car j’ai pêché. » Doux euphémisme qui sort de ses lèvres légèrement pourpres. Ses yeux bleus fixent le sol et ne semblent pas vouloir s’en détacher. Du bout de ses doigts, elle chercha le tissu pourpre qu’elle commença à triturer machinalement, sa tête bascula sur le côté comme une petite poupée désarticulée. « Je vous écoute mon enfant. ». Que dire ? De toute façon, ils ne comprennent jamais rien, parfois ils marmonnent et vous disent de prier Dieu, de vous pardonner d’accepter. Mais ta gueule. Si Anja avait un profond respect pour Dieu, les prêtres et tout la clique n’étaient que des fabulateurs, des cracheurs de paillettes, ouais. « Vous pigez rien. » - « Et bien commencez par le début ».

« Honningsvåg ? C’est cool. C’est pas là où y’a les cinglés ? Attends, je crois que j’me souviens du nom. La communauté des douze prophètes. Ouais, des tarés qui prient toute la journée et qui n’utilisent pas de tracteurs, rien, nada ! Ils s’habillent tous en blanc, genre couleur de la pureté toussa. ‘Fin dans la région on les aiment pas trop, ils sont zarb et puis certains disent qu’ils sont satanistes, qu’ils font des sacrifices et tout. Personne n’a jamais été arrêté, mais on évite de les approcher en tout cas. Parfois y’en a un ou deux qui sort de leur camp, pour acheter des trucs à l’épicerie, mais ça s’arrête là. »

La communauté des douze prophètes. Une cinquantaine de personnes qui se sont regroupés autour de douze mages qui assujettissent les humains en se servant de leurs pouvoirs. La révélation n’a pas encore eu lieu et se rattacher à la foi reste un bon moyen pour avoir une emprise sur autrui. Douze mages qui ont persuadé qu’ils étaient les sauveurs de l’Apocalypse avec en prime quelques tours de magie pour contrôler tout le monde. Voilà où Anja naquit et vécut jusqu’à ses dix-huit ans. De l’extérieur, une secte, ça craint. Mais lorsque l’on connait que cela, on est obligé d’y croire, on y est plongé jusqu’à la moelle et tout ce que l’on nous dit est la pure vérité. Son enfance, Anja la vécue avec d’autres enfants de la communauté, tous ayant un père sorcier, descendant d’un des douze mages, truc de cinglé. Jusqu’à quinze ans, les enfants sont sous l’autorité de leur parent et suivent l’école. Bible et prières régulières au programme.

Les douze mages, tous les respectent et les craint à la fois. Personne ne connait encore l’existence des sorciers et tous pensent être sauvés de la fin des temps à leurs cotés. Ils ont tout pouvoir et en sont conscients. Les autorités ferment les yeux, la Blanche confrérie également. Ils sont loin et ils ne font pas de mal, ils s’amusent juste avec les pauvres petits humains. Mais la réalité est tout autre, les mages ont plusieurs épouses qui n’ont pas toujours la majorité, les femmes sont là pour reproduire et certaines expériences détruisent le psychisme des habitants. Voir une folle errer dans la forêt, n’est pas quelque chose de rare.

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« Durant mon enfance, je ne me rendais pas compte de ce qui m'attendrai dehors. Vous savez enfant, on vous cache pas mal de choses. Le père noël, le sexe, la mort. Face aux gamins, on a toujours tendance à enjoliver la vérité, voir parfois à en inventer une de toute pièce. On vous enferme dans une pièce aux couleurs pastel qui respire le frais. Et puis, on grandit, on se prend les pieds dans le tapis et là, c’est pas l’drame, mais presque. Plus ce que l’on vous cache est gros, plus la déception est grande c’est connu. Y’en a qui réagisse bien, d’autres moins, moi j’ai mis du temps à capter, j’y croyais pas. »

« Dieu, dans sa sagesse, nous demande de pardonner nos proches. » Mais ma mère, saleté de vioque, elle était faible, trop influençable. Elle faisait partie du noyau, des premières à suivre les apôtres, les mages, les connards sans sourciller. Je ne la connais pas plus que ça. Je sais qu’elle m’aimait, du moins je le crois. Mais elle était faible, ‘puis on ne s’attache pas vraiment aux autres. Toutes les femmes sont nos mères, tous les hommes sont nos pères, c’est comme ça.

« Et puis un jour on s’écroule. On se rend compte de ce qui nous attend sans pouvoir reculer. »

« Tu es une femme maintenant. Tu sais que certains sont choisis comme prophètes ? Te sens-tu prête pour une telle responsabilité Anja ? Ce n’est pas à prendre à la légère. Il faut servir la communauté avec justesse. »

Elle acquiesce. Certes elle ne sait pas ce qui l’attend, ce qui va lui arriver, pour l’instant elle veut juste être la meilleure, être bien vue, être l’aimé. Tous attendent d’avoir de la reconnaissance, jusqu’à accepter les missions les plus ingrates pour soi-même tant que les autres nous regardent un peu. C’est vicieux, pourtant ça marche. Lorsqu’on propose à la petite Norvégienne d’endosser ce rôle, Anja n’a que quinze ans, elle connait déjà la Bible par cœur et certains voient en elle une grande descendante des douze mages. Et elle se fait à l’idée que des autres ont d’elle, à ce qu’on attend d’elle. La rébellion ne lui ait pas même venu à l’esprit, si certains sont partis après la Révélation, une communauté resserrée reste encore accrochée aux fabulations des sorciers. L’emprise est telle qu’ils croient toujours que ces mages sont là pour les sauver, Anja compris. Partir ne lui vient pas à l’esprit, elle est la petite soldate docile, celle qui acquiesce et qui fait tout ce qu’on lui demande, sans jamais se poser de véritables questions.

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L’ambiance est étouffante. Le cliquetis de serrure se fait entendre, doucement. Elle gémit. Non pas encore, c’est trop tôt, plus jamais. La chambre est petite, miteuse. La porte s’ouvre doucement, butant contre un plateau repas à peine touché. Le rai de lumière la touche de plein fouet, elle grogne. Sa peau est devenue presque translucide, ses yeux bleus se posent quelques instants sur l’homme qui a ouvert la porte. Délivrance ? Trêve de conneries. « C’est l’heure, Anja. Allez, lève-toi. » Prostrée dans un coin de la pièce, la tête coincé entre ses deux bras, la gamine ne bouge pas. Il ne fallut pas attendre longtemps avant que deux bras la soulève sans plus de compassion, la tenue en lambeau tombe vite sur le sol terreux. Le constat est édifiant, squelettique, ses cheveux noirs sont ternes et ses deux yeux bleus semblent errer dans des terres inconnues, parfois une flamme se ravive avant que son esprit rongé s’enfuit dans les limbes, laissant son corps presque sans vie, sans conscience.

La robe blanche lui donne un air irréel, ange fatigué, ange crevé. « Marche ». Impossible, gros connard. Alors, on la traine, comme une poupée de chiffon sans qu’elle ne fasse le moindre geste, la moindre parole. Jetée sur une chaise en bois, les incantations commencent. Elle se réveille. « NON ». Personne ne semble troubler par cette plainte qui se voulait imposante. Les incantations se poursuivent. L’ancienne langue slave est utilisée, dialecte utilisé pour invoquer les esprits. Soudainement, Anja se met à trembler, doucement, que la transe commence. Brusquement, ses yeux s’ouvrent laissant voir ses pupilles bleus qui désormais scrute l’assemblée, son corps si faible et recroquevillé s’était tendu, la tête redressée, le regard fière, une assurance qui n’était pas la sienne. Les incantations s’arrêtent, un des mages s’avance, « Freyja ? ». Un sourire s’esquisse. « Bonjour Höd, cela faisait presque trop longtemps. ». La main blanche d’Anja se lève alors que Freyja regarde son nouveau corps. « Son esprit se débat. Faisons vite, nous n’avons guère le temps. »

Freyja, Cassandre, Harold, Caïn … Je ne les ai jamais véritablement comptés. En réalité, être prophète ce n’était pas aussi joli et sympa que cela en avait l’air, réceptacle pour des esprits errants. La plupart étaient des sorciers, tous des esprits paumés, errants, certains étaient d’anciens de la communauté, mais Freyja était probablement la plus puissante. Sorcière des années 1820, elle guidait les sorciers et en échange elle empruntait le corps des uns et des autres pour survivre et exercer sa magie si son réceptacle, si son corps avait du sang de sorcier dans les veines. Elle ne m’aimait pas, car même si elle essayait de prendre entièrement possession de mon corps, de mon esprit et de mes capacités en sorcelleries. Je les ai enfouis pour que jamais elle ne puisse faire de la magie, à travers moi. Ce fut la plus dévastatrice également. Lorsqu’elle en a eu marre de se battre tout le temps contre moi, elle se chercha un autre hôte. Ce putain d’esprit y est pour quelque chose si désormais les esprits semblent venir me hanter.

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« Vas-y » - « Fais-le. » - « Elle est juste là, devant toi, la porte de la liberté, tu n’as pas envie d’y aller ? De quitter ces dingues qui te font tant souffrir ? » - « Ne fais pas ça, tu le regretteras, tu as ton père, ta mère ici. » - « Tu verras, ça sent la grillade. » - « Tu serai capable de tuer ta mère ? Ta famille ? » - « Tu n’es pas prête pour le monde extérieur, tu te feras bouffer en moins de deux. » - « Si tu pars d’ici, si tu n’auras plus à nous supporter, on pourra te quitter, te laisser tranquille. » - « Faut juste la craquer, tu verras, c’est facile. » - « Tu en es incapable. Laisse un de nous le faire. » - « MAIS PUTAIN DE BORDEL, VOS GUEULES. Je le peux, j’en suis capable. ».

Je ne sais pas comment je me suis retrouvée dehors, ni par quel miracle je n’étais pas brulée. Je ne sais pas qui avait pris le contrôle, qui m’avait délivré. Depuis longtemps, je me sentais enfin responsable de mes propres actes, des mes propres paroles. Ils ont tous cramés, enfin pas tous. Certains s’en sont sortis et sont partis en courant. Moi je suis restée, devant un tel spectacle je suis restée bouche bée. Dire que tout était partie d’un briquet tombé de la poche de celui qui m’apportait à manger. Je l’ai actionné et j’ai vu surgir la flamme. C’était clair, si simple et pourtant se précipiter ainsi dans le vide était tout de même compliqué. Je ne les ai pas tués, je me suis délivrée.

Lorsque les autorités sont arrivées j’étais toujours là, le briquet à la main. Vu mon état, ils n’ont pas fait de moi un Jésus Christ moderne lapidé par les journalistes. J’étais la gamine qui après avoir subit d’atroces supplices, insurmontables psychologiquement et physique j’avais trouvé ma porte de sortie. L’affaire fit le tour de Norvège. La secte était enfin détruite. Moi, on me mit dans un hôpital psychiatrique puis en famille d’accueil jusqu’à ce que je m’adapte à ma nouvelle vie. Etrangement, je n’avais aucun remords et avait la soif d’apprendre. Mon acte de folie alors que j’avais à peine 18 ans venait de me sauver, de m’offrir une nouvelle vie. Parfois ils revenaient. Certains étaient plutôt bienveillants, m’aidant, mais la plupart semblaient être ravi de pouvoir tourmenter une jeune humaine qui paraissait folle aux yeux de tous. Et puis parfois quand j’allume un briquet, tout s’éclaire, les esprits s’échappent et je suis en paix.

A vingt ans, on me dit que j’étais assez forte psychologiquement pour pouvoir me débrouiller toute seule. La seule envie que j’avais, était de partir, loin d’ici. Ce que je fis. J’ai dormi sur des canapés, des hôtels miteux, des bancs, des plages, j’ai baisé, j’ai bu, je me suis droguée. Diantre que c’est bon la liberté, ça, gamine, on ne me l’avait pas dit.

En plus, il avait raison, ça sent le jambon.

◊

« Et puis il y a ce désir. Cette pulsion. Insoutenable et incontrôlable. Je n’arrive pas à me détacher de son visage, c’est ce que je suis. Une flamme qui grandit, peu à peu, les lueurs rougeoyantes alors que la lueur vacille. C’est intolérable et inadmissible de ne pas pouvoir se délecter de cette délicieuse vision. Je n’arrive pas à m’en détacher, elle me possède. Vous comprenez ça ? Elle me possède. Tellement que parfois j’aimerai bruler vive juste pour ressentir. Ce n’est pas l’enfer, ce n’est pas Satan ou les âmes meurtries qui m’appelle, juste cette satané lueur vacillante. Ca me dévore, c’est juste doux et délicieux. Un orgasme. »
Son visage s’est illuminé, un regard maladif s’est empreint d’elle. Ses mains se crispent sur le tissu alors qu’un sourire s’esquisse. Ses lèvres tremblent, sans même sans rendre compte, la voila qui vacille. Soudainement Anja reprend ses esprits, son regard se fait plus froid, glacial, à l’honneur de son pays, se mordant la lèvre pour ce moment de faiblesse, elle crache, elle chuchote à travers la cloison « Vous voyez, vous ne pouvez pas comprendre ». Faut être cinglée pour capter.