➽ date et lieu de naissance. 3 mai 1988 à Washington ➽ nationalité. Américaine ➽ état civil. célibataire ➽ lieu d'habitation. Midtown. ➽ métier. Bidouilleur informatique➽ étiquette qui vous est collée. L'antipathique grincheux, vous voyez ? Le type peu causant et très peu aimable qui sociabilise juste le strict minimum pour pas finir en taule ? Bah voilà.

Vous voyez, il dit qu'il est peu causant, il ne ment pas. Ah, non, à votre place je n'irais pas à la pêche aux informations. Il ne ment pas non plus sur le reste : il est à peine sociable et très peu aimable. Bonjour, il connaît. Au revoir, il adore. Merci, personne ne l'a jamais entendu le dire, en revanche. Il fait ses petites affaires, et il entend que personne n'y mette son nez. Parfois, il est abordable, ceci dit. Parfois. Dans des circonstances particulières. Quand il rattrape ces années de beuveries dont ses parents l'ont privé, par exemple. Là, peut-être bien qu'il voudra engager la conversation. Mais si ladite conversation ne vous plaît pas, vous ne vous en prendrez qu'à vous-même.
Au fond, moins il fréquente les gens, mieux il se porte.

Je vous déteste. Cherchez pas, c'est comme ça, je peux pas vous piffer, tous autant que vous êtes.
Vous avec vos larmes de joie et de douleur, avec votre plaisir coupable pendant les séances SM, et qui n'avez jamais vu l'intérieur d'un hôpital de toute votre vie.

Je vous hais, parce que vous pouvez pas comprendre. Vous n'imaginez pas ce que ça fait d'être handicapé comme je le suis. De ne pas ressentir la douleur. De ne jamais pleurer. De ne pas pouvoir compatir quand un autre souffre, parce qu'on sait pas ce que ça fait. De faire des putains d'IRM tous les mois depuis plus de 23 ans. J'ai tellement de produit de contraste injecté dans le corps que je suis pas loin de briller dans le noir.

Alors, ouais, je suis pas sociable, je suis grognon, j'aime pas les gens et j'envoie tout chier dès que j'ai un pet de travers. Et vous comprendrez jamais pourquoi, et vous n'essayerez même pas de le comprendre, et ça, ça me fout en rage. Parfois, vous vous intéresserez à moi, comme on s'intéresse à un insecte en train de se noyer, une curiosité de passage, que vous oubliez aussi vite. Je vous emmerde.

Vous voulez pas me fréquenter, et ça me va très bien. Alors maintenant, soyez assez sympa pour me fiche la paix et arrêter de faire semblant de vous intéresser à moi.


Vous commencez doucement à me courir avec vos questions, là … Vous voulez pas non plus que je vous raconte le journal intime de mes chaussettes ?

Je répare des ordis, des tablettes, des APN et autres appareils du genre. Une pièce de mon appart est convertie en atelier.
Croyez pas que je reçois les clients directement : ils déposent leurs trucs dans une énorme boîte aux lettres avec un mot du problème (qui de toutes façons est jamais bien plus précis que "Le truc fait un pouet quand je clique") et leur adresse. Je diagnostique, j'envoie le devis par mail, ils me valident, je répare, je leur donne une heure de récupération par mail, ils viennent à la porte, me filent le fric, récupèrent leur machine, oublient de me remercier, râlent sur les prix et repartent. Ceux-là, moins je les vois, mieux je me porte.

En-dehors de ça, je traîne les bars, parfois, le soir quand j'ai envie de me mettre minable et de me foutre de votre gueule.
Je vais à l'hôpital de temps en temps, quand j'ai assez économisé. Une consultation basique, j'ai plus de quoi me payer une IRM tous les mois, et j'irai pas à moins de me mettre à vomir du sang, ce qui n'est pas encore arrivé.

Et je vous fuis comme la peste.

 
Vous avez pas un peu fini de me faire chier, oui ?
Vous voulez pas non plus que je vous donne le nombre de mes caleçons ou combien j'ai de poils au cul ?

Eh bah voilà, il vous tourne le dos. Il fallait s'y attendre, remarquez. N'insistez pas, il ne vous répondra rien d'autre à ce sujet. Et moi, tout ce que je peux vous en dire, c'est qu'en-dehors de réparer les ordinateurs et de gagner sa croûte, il n'a pas tellement d'occupations. Déjà, parce qu'il faut bien le dire, il n'a pas d'amis. Pas de maîtresse non plus, et pas même une poupée gonflable pour avoir un semblant de compagnie. Les animaux, il n'aime pas, les plantes, il les fait mourir.
Peut-être bien qu'il attend de trouver un moyen de passer à autre chose. Un genre d'illumination, vous voyez. Parfois, il s'assoit dans le canapé, il décapsule une bière, et il la descend, lentement, très lentement, en fixant un point au plafond. Rien de plus. Il ne parle pas tout seul, non, il ne vire pas fou. Il chatte, mais pas tellement, au fond. Il regarde des films, des séries, il télécharge illégalement et il s'en fiche, à ce que j'en sais. Quand il sort dans des bars, c'est qu'il a envie d'être cynique. Il ne vaut mieux pas le croiser dans ces moments-là.


Oulah, il vous a sorti son regard noir. Le plus noir, le plus dur. A votre place, je n'approcherais pas de trop près, ça va mal finir ... Et regardez qui s'y colle encore, aux questions ?
La Révélation … Evidemment, il est dans le dans le camp des proies, et ça ne devrait pas tellement lui faire plaisir. Mais je pense qu'il s'est senti comme un monstre toute sa vie, alors ça doit lui faire du bien de voir qu'il n'est pas seul. Et puis, pour le moment, il n'a jamais eu d'emmerdes. S'il a croisé des vampires ou des sorciers, ou des métamorphes, ils ne l'ont pas jugé digne d'intérêt, et ça a sûrement été réciproque. Personnellement, je me dis que ça va bien finir par lui tomber sur le coin du nez mais ... Il n'a pas l'air de s'en soucier.

 
Non. J'en ai marre, je vous réponds plus, vous me faites chier.

Vous allez finir avec un coup de poing dans le nez. Je vous aurais prévenu. En plus, là, vous touchez à un point sensible. Les tatouages, les piercing, il n'a rien de tout ça. Son corps est vierge (littéralement, en plus), il a été protégé toute sa vie. Ah, des cicatrices, il en a des tas. Des petites coupures, le plus souvent, quand il n'a pas fait gaffe, et la nourrice non plus. Mais ne comptez pas sur lui pour qu'il parle de sa maladie. C'est lui faire évoquer l'Enfer. C'est lui montrer qu'il n'est pas normal. C'est lui rappeler qu'il vous déteste, tous autant que vous êtes. Moi, je dis ça pour vous. Celui-là n'a rien de particulier qu'il a envie d'évoquer, alors n'appuyez pas là où c'est rouge. Il va finir par mordre.

Bill Gates, vous connaissez ? Le génie qui a inventé Microsoft ? C'est mon oncle. Ouais, voilà, je viens d'une famille tellement pétée de thune qu'elle savait pas quoi en faire. Du moins jusqu'à ce que je naisse, parce que depuis, j'ai sérieusement entamé le capital du tonton.

On a découvert que j'étais atteint d'Insensibilité Congénitale à la Douleur quand j'avais trois ans. Toujours les lèvres en sang, et, un jour, j'ai eu un abcès à l'intérieur de la joue à force de la mastiquer sans faire gaffe. C'est là que l'enfer a commencé.
Quand on a un riche parent comme ça, qui, en plus, nous a à la bonne (c'est dur de pas avoir un gamin de trois ans à la bonne, vous me direz), il est forcément tenté de dépenser des fortunes pour essayer de vous guérir. Il l'a fait. J'ai passé des tonnes d'examens médicaux. Mais le soucis, c'est que ma maladie, on n'en guérit pas. On en crève, un jour, parce qu'on a pas fait gaffe et qu'on a une hémorragie interne ou le cerveau perturbé.

Ça, ils ont jamais voulu l'accepter. Ni l'oncle, ni les parents.

Parce que le truc, avec cette maladie, c'est qu'on ne ressent pas la douleur. Aucune douleur. La petite piqûre, les os cassés, l'organe qui part en vrille... Rien. On ne transpire jamais, non plus. Je souffre régulièrement d'hyperthermie. J'ai toujours un thermomètre fourré dans une poche.
Alors j'ai passé ma vie, une fois par mois, à faire un check-up complet à l'hôpital. C'est pas comme si ma famille avait pas les moyens. Ils mettaient tellement de bonne volonté à vouloir me garder en bonne santé que je leur ai jamais dit à quel point je vivais l'enfer.

J'ai grandi seul. Je n'avais pas le droit d'aller jouer dehors avec des amis, je n'avais pas le droit de faire des sports où je risquais de me faire mal (et là, à part le ping-pong, et encore, des fois que je glisse et me cogne sur le coin de la table …), je n'avais le droit de rien. Je faisais mes études à la maison, j'avais des tas de professeurs. Oh, la propriété était grande, immense, j'avais des tonnes de jouets, les dernières consoles avant même qu'elles sortent, tous les jeux en avant-première … Et une nounou qui ne me lâchait jamais les baskets. Jamais.
Pas de petite-amie, non plus. J'ai à peine eu le temps de voler un baiser à la gamine d'un ami de mes parents en visite, une fois, avant que le maître d'hôtel me dénonce. Et après l'humiliante inspection de la cavité buccale pour vérifier qu'elle m'avait pas fait mal sans faire gaffe, croyez-moi, j'ai jamais plus recommencé.

Je vivais sur le net. C'est à peu près le seul endroit où je pouvais avoir un contact humain. J'ai failli virer geek, sérieusement. Avec les relations que j'ai, je peux me vanter d'avoir un sacré bon niveau en informatique. Et puis un jour, je me suis rendu compte que ces « amis du net » me prenaient surtout pour une bête de foire. Ou un moyen d'accéder à oncle Bill. Une putain de bande d'enfoirés. J'ai laissé le net, pas fait pour moi non plus.

A 22 ans, j'ai fugué. Ça a l'air bête, de dire qu'on a fugué une fois majeur, mais dans mon cas, y'a vraiment pas d'autre mot. J'en pouvais plus, d'être coincé à la maison, de ne rien faire. J'en pouvais plus de ma vie. De la vie en général, d'ailleurs.
J'ai bourlingué à droite et à gauche, en appelant la famille de temps en temps pour les rassurer. Ils essayaient de me faire rentrer, mais je voulais pas, plus jamais.

Un jour, y'a six mois, un coup de téléphone a sacrément freiné mes ambitions de vadrouille :

« Darren ? C'est Bill.
- Oncle Bill ! Ah bah ça alors, si je m'attendais …
- Comment tu vas ? Tu es allé faire ta visite mensuelle ?
- Ouais, t'inquiète, j'ai pas oublié. Tout va bien.
- Tu as été où ? Quel hôpital ?
- Tu crois que je vais te dire dans quelle ville je suis, pour que dans 5 minutes j'aie la police qui vienne frapper à ma porte ? Déjà, tu te doutes bien que mon portable va filer droit dans les chiottes dès que je raccroche, hein ?
- Darren, ça suffit maintenant. Tu as fait passer ton message, on a bien compris, tu te sens étouffé. Mais si tu ne choisis pas la solution raisonnable, et que tu ne rentres pas chez tes parents, je peux te garantir que dès le mois prochain, plus un cent ne rentrera sur ton compte, gamin !
- Mais enfin, tu peux pas ! Et l'hôpital ? Et les check-up ? Comment je paye ?
- Tu as un mois. Pas un jour de plus. »

J'ai cru qu'il bluffait. Sérieusement, je pensais qu'il me testait. Ben dites-vous bien que si Bill Gates en est arrivé là où il est, c'est parce que justement, il bluffe jamais dans ces cas-là. Ah, ça m'a bien fait mal au cul cette histoire. Heureusement, dans le doute, j'avais quand même acheté un appartement en ville. Et puis parce que raquer un loyer tous les mois, ça m'emmerde.

Reste que je me suis retrouvé sans le sou, paumé dans un village au nom pourri de « Shreveport », sans rien de plus qu'un appartement et trois économies, et sans moyen de m'en sortir, parce qu'il était juste hors de question que je fasse appel à mon oncle ou mes parents et que je leur donne le feu vert pour qu'ils me refoutent droit en enfer.
Depuis la Révélation et toutes les catastrophes qui en ont découlé, en plus, ce coin était de plus en plus évité par les déchets du genre humain. Au fond, le meilleur endroit pour crever tranquille.

J'ai donc mis au service des habitants mes compétences en informatique pour réparer leurs engins, ce qui me rapporte assez de blé pour vivre plutôt correctement. Enfin, pour vivre, quoi. Les gens qui me fréquentent le font que par intérêt, et ça me va. De toutes façons, ils sont bons à rien d'autre.

➽ personnage inventé/scénarii/prédéfini ? inventé ➽ pseudonyme. Darren, ça ira bien ➽ âge. 25 ➽ code du règlement. Et bien, il ne manque plus que le thème musical de Dracula, prince des ténèbres, et je crois qu'on pourra commencer. ➽ avis général à propos du forum. Assez bien pour que je m'inscrive, non ? ➽ avatar utilisé. Gaspard Ulliel