traits de caractère.
Gentille, sensible, impulsive, charmante, taquine, intelligente... C'est bien beau tout ça, mais franchement, que cela soit en bien ou en mal, vous trouverez toujours un nouveau qualificatif qui pourrait me sied alors pourquoi devrais-je tout déballer ici, hein? Certains ne comprennent pas que je ne puisse tenir en place, et m'attribue dès lors une étiquette de femme exubérante. Imaginez une surface d'eau, hein? Opaque en apparence si vous ne regardez pas correctement, mais si vous y balancez un caillou, le tout se trouble et crée une multitude de réaction en chaîne qui échappe à votre contrôle. Je suis un peu pareille. Mais si je suis capable de crise de fureur incroyables, je ne suis pas méchante. J'aime même penser que je suis le genre de personne avec lequel il est facile d'apprécier la compagnie. Après tout, si on ne se casse pas le cul, si on apprécie ce qui est simple et si on le reste tout autant, il ne devrait pas y avoir de problème, pas vrai? Je pense être mature, et je regarde ce monde avec l'œil patient qu'un parent pourrait avoir parfois sur un enfant qui balbutie et fait des erreurs. Je regarde le monde comme une accumulation d'expérience et puisqu'au final, il faut faire des erreurs pour apprendre de ces dernières, je reste relativement tolérante. Il n'y a que quelques grands "crimes" que je ne supporte pas. L'hypocrisie, la méchanceté gratuite, la trahison... J'en ai suffisamment souffert pour savoir que ce n'est pas top d'être du côté qui prends tout. Et ne croyez-pas tenter de me berner si facilement, j'ai l'œil et si j'ai des airs fragiles et naïfs, il n'en est rien: si vous espérer me manipuler, sachez que je retournerais votre veste avant que vous ne le compreniez et qu'au final, c'est moi qui m'amuserait de vous...

J'aide volontiers si je peux être utile en quoi que ce soit, je ne suis pas le genre à regarder de trop près et de commencer à réclamer un service rendu si j'en offre un. En ce qui me concerne, c'est tout le contraire du fait de rendre service. Je ne rechigne pas devant la tâche et si jamais il s'avère que je ne suis pas de taille à affronter un obstacle, je n'ai généralement pas peur de demander un coup de main à mon tour. Mais cela dépends aussi un peu: j'ai mon jardin secret, mes mystères, mes énigmes. Si je suis celle qui prendra volontiers part à une fête ou à une célébration diverse, je suis aussi celle qui en repartira seule et plongée dans ses souvenirs, noyée dans sa solitude. J'aime bien être seule, ça me permet de réfléchir sur les évènements de la journée et de ressasser d'autres souvenirs qui ne sont pas forcément plus gais, mais qui me restent utiles et me permettent de ne pas perdre de vue une vérité essentielle: tout n'est pas forcément comme on aimerait que cela soit. Et si j'ai le rire facile avec les enfants et que je ne crains pas de courir par ci par là comme une fille sur ressort, je suis aussi emprise de noirceur et de rancœur par moment... J'ai la critique facile... vis à vis de moi. Je ne suis pas exactement perfectionniste et je sais qu'Oscar Wilde disait que si on ratait la lune on récoltait toujours les étoiles, mais je suis comme ça: si je me fixe un but, j'ose espérer l'atteindre sinon je serais terriblement frustrée et passerais une bonne semaine à me fustiger mentalement...

occupation diurne.
Je m'occupe de mes animaux, je les bichonne, je les nourris, je les monte aussi, suivant mon envie du moment. Tous les mercredis j'organise un atelier pour les gosses du service pédiatrique de l'hôpital général; enfin, bien sûr, ça dépends de leur état de santé, les accidentés et les malades me sont confié le temps d'une après-midi, afin de profiter de l'effet thérapeutique du contact d'avec des chevaux. Il arrive aussi, mais moins fréquemment, que j'organise des activités en plein air pour des classes d'une trentaine de gosse à la fois. Tir à l'arc, randonnée, ou tout simplement redécouverte de cette nature qu'ils imaginent connaître déjà. De temps à autre, j'ai des invités bien moins jeunes qui frappent à ma porte: mon affiliation à la Déité Lumineuse me permet une capacité de guérison étonnante que je peux appliquer à autrui, et l'idée plaît aux métamorphes, même si les lycans sont un peu plus réticents à m'accorder leur confiance. Et quand je ne fais pas tout ça, et bien je vis, comme tout le monde: je vais me baigner, je vais faire des courses, je sors en ville boire un verre. Vivre parmi les gitans ne veut pas nécessairement dire vivre coupé du monde, hein??

manie, habitudes & goût.
❧ Un café noir, deux sucres, tous les matins au lever du lit
❧ Au plus je m'énerve, au plus vite je parle... Vous comprenez à mon débit si je suis calme ou non..
❧ Je suis une couche tard, et une lève-tôt. Et je ne m'en porte pas plus mal
❧ J'adore manger épicé
❧ Je ne suis pas vraiment le genre à dépenser sans compter ou juste sur un coup de tête. Je peux garder quelque chose pendant des années si ça me sert toujours
❧ Je chante sous la douche, même si c'est bas assez pour être couvert par le bruit de l'eau
❧ Les temps de pluie semblent me démoraliser plus que de raison
❧ Il existe plus pudique que moi
❧ Mais je ne suis pas exhibitionniste
❧ Je cours beaucoup. Souvent. Trop?
❧ Je parle à mes plantes et à mes chevaux... et alors?!
❧ Je déteste danser. Il faut vraiment que je sois saoûle pour que je me mette à enchaîner les pas...
❧ ... et je tiens très bien l'alcool, dommage hein?
❧ Je commence à m'intéresser au mouvement New Age, sans vraiment chercher à pratiquer. Mais toute cette discussion de symbiose avec la nature et de respect etc. cela ne pouvait pas ne pas attirer mon attention...

raison de votre exil.
J'en avais marre de croiser le regard de celles qui pouvaient parfaitement avoir passé la nuit avec l'être que j'aimais. Est-ce que cela était stupide de ma part? Aurais-je dû jouer les bonnes poires et faire comme si rien ne s'était passé? Non, je ne l'aurais jamais accepté. Peut-être suis-je une idéaliste, peut-être ne suis-je qu'une belle idiote, mais je pense que j'ai toujours su que le rêve était trop beau pour être vrai. Il suffit de voir comment celle qui m'a défiée était superbe. Parfaite. Sans le moindre défaut. Comment voulez-vous que je tienne tête à une incarnation si idéale de nos valeurs les plus fondamentales? Je ne le pouvais pas. Je ne pouvais pas le regarder vivre sans moi non plus, et tant pis si cela fait de moi une belle égoïste. J'en était incapable... Alors je suis partie.

découverte de votre nature
Toute ma vie, j'ai vécu avec le poids de la différence posé sur mes épaules. Oh, bien sûr, je possédais la beauté et la grâce de ma mère, à la suite de laquelle j'ai poursuivi l'affiliation à la Divine Déesse de la Lumière. Mais je n'étais pas des leurs. Partager leur croyance et leur don ne faisait pas de moi un membre de la Cour à part entière, parce que j'avais toujours sa part en moi. Cette part que j'héritais de mon père. Celle qui faisait de moi une anormalité irréelle aux yeux des membres de la Cour d'Eté. Je n'avais pas hérité de la faculté qu'avait mon père de se transformer à volonté ou presque en l'animal de son choix; je n'ai jamais eu cette chance. Pour moi, le gène a muté, s'est mêlé au sang de Sidhe que je tiens de ma mère pour former une forme de mutation génétique qui s'est traduite en plusieurs particularités physiques qui aux yeux de tous sont synonymes d'une véritable abomination: j'avais les oreilles bien plus fines que la normale, presqu'en pointe alors que le canon de la beauté en vigueur exigeait qu'une sidhe possède des oreilles comme tous les autres: arrondis et doux au toucher. Les miennes n'allaient pas vous couper un doigt, mais on pouvait deviner l'aspérité de la peau et la finesse de l'épiderme couvrant le cartilage: je n'étais pas normale. Et si encore j'avais pu dissimuler cela par ma chevelure, ça aurait pu faciliter les choses, mais on ne peut pas cacher un regard à moins de passer sa vie voilée et mes yeux à moi avaient une couleur qui -je l'étais sûre- était unique en Féerie. Ce qui est étrange et peu courant n'avait jamais pu passer pour une beauté particulière auprès des miens, et j'ai toujours vécu en ressentant posé sur moi le regard de reproche, un peu comme si leur yeux me critiquaient d'être impure. Ou peut-être n'était-ce que moi qui imaginais ces regards, inspirés par mon propre dégoût de moi même et mon propre ressentiment? Je l'ignore...

J'aurais pu en vouloir à mon père pour cet héritage empoisonné, mais je n'y arrivais pas. Parce que, d'une part, j'étais parfaitement consciente de la futilité d'un tel désir, mais aussi parce que si j'avais hérité de cette tare, son sang m'avait fait un cadeau tout autre: le peuple de mon père avait toujours eu la faculté de communiquer avec les animaux. Certes, je n'étais pas à me faire une conversation silencieuse avec les bêtes du Palais à chaque fois que l'occasion se présentait: mon pouvoir n'était pas suffisamment développé pour ça. Non. Je me contentais de ressentir. De traduire mon émotion en mot d'une langue que nul autre que moi n'aurait jamais pu comprendre. Mais les animaux, eux, comprenaient, et ils étaient pour ainsi dire les derniers amis que je n'aurais jamais...

conviction.
La Révélation n'a provoqué en moi qu'un ébahissement total vis à vis des humains. On leur annonce que ces créatures sanguinaires existent et tout ce qu'ils trouvent à faire c'est courir dans leur bras et commencer à les aduler. Bien sûr, la fascination pour le macabre a toujours fait partie inhérente de la nature humaine, mais là c'est .... je sais pas, totalement incroyable? Si les humains savent désormais pour les vampires, ils restent toujours aussi ignorants de l'existence de mon peuple, des êtres qui peuplent leurs rêves et qui tapissent les murs de leurs contes de fées. Je ne suis pas la gentille marraine, mais franchement, c'est un sacré soulagement. Comme quoi, parfois le déni a du bon. Je ne suis pas pressée qu'ils découvrent ma nature à moi, pour être honnête...

signes particuliers.
Etrangement assez, mes yeux semblent toujours avoir un effet frappant sur les gens. Mis à part ça, et la petite cicatrice que j'ai un peu au dessus de ma clavicule gauche, je ne vois rien de véritablement utile à signaler.

histoire.

Feel the warmth of your embrace
But there is nothing but silence now
Around the one I loved
Is this our farewell?

Le monde n'est pas automatiquement celui que vous pensez connaître. Il existe des recoins inconnus du genre humain, un univers entier où le fantastique et l'imaginaire semblent avoir installé leurs quartiers. Ce monde a ces propres lois, ces propres règles et la compréhension de l'homme ne pourrait commencer à effleurer ce savoir. C'est de là que je viens.

Féerie.

Un mot qui fait rêver, pas vrai? Un territoire divisé en deux royaumes, complémentaires mais pourtant si disparates, comme le jour et la nuit, le bien et le mal. L'Ombre et la Lumière. Les Cour d'Eté et d'Hiver ne se mêlaient jamais des affaires de l'autre, chacune trouvant moyen de mépriser sa soeur pour telle ou telle raison: pas assez beau, pas assez cruel, etc. Bref, vous comprenez le tableau. C'était comme si l'une craignait d'attraper une maladie que l'autre véhiculait, tant elles s'évitaient au possible. Je suis née au sein de la Cour d'Eté, en une journée rythmée par les rires et la musique, dans une atmosphère mue par les danses de mes pairs et leurs fêtes continuelles. Mais l'accouchement d'une Sidhe ne se fait pas en silence, comme toute naissance: ma mère, suivante de la Reine de Lumière, laissait ses cris de douleurs résonner dans tous les couloirs séparant la chambre où elle peinait à me mettre au monde et le hall de célébration. Elle avait toujours été une favorite de la Reine, et ses consoeurs suivantes assistaient à ma naissance. Pendant des heures, rien ne fut autre pour donner écho à la fête en bas que les cris de douleur de ma mère, avant de finalement s'achever sur un hoquet de surprise de la part de la "sage-femme" (dirons-nous). Alyz venait de me donner la vie, à moi, cette petite chose telle que n'en avaient jamais vu les accoucheuses. Je ne pouvais le voir alors, ni même m'en souvenir, mais je devine qu'à la vue de cet être dont ma mère venait d'accoucher, celle qui avait aidé à me donner la vie a dû poser un regard ébahi sur Alyz, m'offrant pour que ma mère puisse me prendre dans ses bras avant qu'elle ne laisse ses larmes de tristesse et de joie perler sur sa joue avant de chuter et éclater sur les miennes. Enfouie dans les tissus de lin qui me maintenaient au chaud, je représentais bien plus qu'une nouvelle vie au sein de la Cour. Je représentais un secret qui n'était plus, disparu au vent aux premières notes de ma venue au monde...

●±‡±●

Je n'ai jamais connu mon père. Enfin. De vis à vis, je veux dire. Pour le reste, j'ai tellement eu de questions quand j'étais jeune que ma mère me parlait plus souvent de lui que de n'importe qui d'autre; je me demandais pourquoi je n'étais pas comme les autres, si j'étais malade, j'ai même cru à un moment que j'allais mourir. Les bêtises que la jeunesse ne vous fait pas croire, franchement, hein? Mais il s'avère au final que ce n'était rien de tout ça. Mon père est juste un être à part à lui tout seul. Mère me racontait l'histoire de comment il se métamorphosait en animal pour l'approcher sans bruit, ou juste pour pouvoir l'observer de loin. Elle me racontait comment s'était passé leur première rencontre, comment elle avait été effrayée par ce qu'il était, comment il l'a rassurée et comment au final ils ont fini par passer de plus en plus de temps ensemble jusqu'au jour où arriva ce qui devait arriver: elle m'attendait. Je n'étais qu'une enfant, il faut comprendre: j'avais besoin de savoir, mais lorsque vint finalement la question demandant où il était aujourd'hui, je l'ai faite pleurer. Je n'ai jamais voulu faire pleurer Mère. Elle m'embrassa le front en me disant qu'il était dans un endroit meilleur, même si à l'époque je n'avais pas la moindre idée de ce que cela voulait dire. J'ai grandi sans père, et ma mère a endossé avec brio les deux rôles et a tout fait pour le rendre aussi vivant que possible à mes yeux, mais il y avait toujours quelque chose qui n'allait pas au fil des ans...

J'étais différente, c'était indéniable...

●±‡±●

Ce n'est pas autant le regard que posaient les autres sur moi qui me sentaient être à part. Non, j'étais bien assez grande pour m'en rendre compte moi-même. Je n'avais rien de semblable avec les autres nés de ma génération et franchement, on aurait tout aussi bien pu laisser la lumière divine baigner sur moi en laissant le reste dans l'ombre que je ne me serais pas sentie plus exposée. Je ne me souviendrais jamais du nombre d'heures que j'ai passé dans mes quartiers, assise sur mon lit, face au miroir en pied qui me faisait face et qui me narguait de mon apparence exceptionnelle. Combien de temps n'ai-je pas passé, les yeux plongés dans le regard de mon reflet, à passer doucement mes doigts sur l'arrête plus accentuée de mes oreilles alors que celles des autres étaient d'une rondeur quasi parfaite? Vous allez me dire "ce ne sont que des oreilles, ne te fais pas de souci", mais j'ai grandi baignée dans nos lois, et si les autres ne me jugeaient pas ainsi, j'étais persuadée qu'ils pensaient comme moi: j'étais à part, je n'étais qu'un monstre, une sang-mêlée née d'une union qui n'aurait jamais dû être au départ. Même les demi fey étaient mieux perçus que moi, parce qu'ils radiaient de la beauté naturelle de leur parent sidhe.

Ces séances "d'observation intensive et de flagellation mentale devant le miroir" étaient telles que jamais je ne l'avais entendu demander à me voir, puis entrer sans que je n'aie jamais invité son arrivée. Mais il était là, soucieux, à espérer ôter mes doutes et effacer mes craintes. Il avait toujours été attentionné avec moi, et le temps aidant, je suis tombée amoureuse. De cet amour dont tous mes parlaient mais que je craignais ne jamais connaître un jour. Et il m'aimait aussi, malgré ma différence, malgré ma tare et le poids du caractère unique qui marquait ma silhouette, belle par le sang sidhe qui coulait dans mes veines, mais aussi terriblement fourvoyée par les gènes animorphes qui avaient créé ces mutations naturelles, comme si la nature avait choisi un compromis entre ce qui devrait être et ce qui aurait pu. Dans les bras d'Halkan, je me sentais choyée, protégée, et j'ai craqué. C'est comme si l'Amour n'avait jamais vraiment eu de sens jusqu'à ce que je le rencontre... Et lorsqu'il demanda ma main, rien n'aurait jamais pu me faire plus plaisir que d'accepter...

Hope fades,
Into the world of night.
Through shadows falling,
Out of memory and time.

C'en est presque amusant ce que la douleur peut vous faire comprendre. En ce qui me concerne, elle m'a ouvert les yeux sur un monde que je croyais connaître, sur un système vis à vis duquel je me pensais familière. Un système où amour et famille avaient encore une signification et où on ne donnait pas d'importance à la trahison et à la tromperie. Quand j'ai su qu'il couchait à droite à gauche, je me suis laissée aller à mon désespoir, inerte. Mais lorsque l'une de ses favorite, avec son physique parfait et son allure hautaine est venue me défier, j'ai compris que je me fourvoyais. La plaie béante de ma douleur s'ouvrait sur une réalité que je n'avais jusqu'alors jamais été réellement prête à accepter et j'ai réalisé bien plus que ce que je ne m'étais jamais crue capable... Était-ce la folie ou bien le courage qui a mû mes pas, me poussant progressivement de plus en plus loin de cette sécurité que j'avais toujours connue?

Une nuit comme toutes les autres m'a vu faire ce que seuls les parias avaient un jour osé faire sans avoir l'intention de revenir: j'ai traversé la Frontière. Changer de monde, disparaître de Féerie pour me heurter à la réalité du monde des humains. Je quittais la surface de mon univers pour finalement arriver dans un autre, identique et pourtant si différent. Je courais, sans savoir où j'allais, sans vouloir voir le chemin qui m'attendait. Je me suis même perdue un instant dans un bois extrêmement dense, l'atmosphère étant alourdie par le mouvement des ramages provoqué par un vent que je ne ressentais pas. A y faire plus attention, j'ai soudainement été témoin d'un phénomène qui tenait tout de la magie, même pour moi: quittant soudainement la douce chaleur d'été de Féerie, j'arrivais sur Terre au coeur d'une averse glacée qui n'eut que d'effet que de me transir de froid. Incroyable que c'était, en sachant que deux mètres auparavant, j'étais persuadée de n'avoir remarqué aucun nuage quand j'avais traversé l'ultime clairière de Féerie. Refusant de céder à la panique face à cet environnement inconnu, je laissais l'instinct dicter mes pas, jusqu'à ce que j'aperçoive au loin une lumière vacillante et que j'entende des rythmes joués avec un tempo enjoué... Un univers entier s'offrait à moi, étrangère dans un monde étrange. J'aurais pu craindre de ce que j'allais y trouver, mais je m'en moquais pour l'instant. Ma tenue était trempée, je n'étais guère accoutumée à la pluie. La fatigue et la douleur ayant raison de toute prudence élémentaire, j'avançais pas à pas, exténuée, avant de m'effondrer à quelques mètres de ce qui semblait être un vif feu de camp...

●±‡±●

Septembre 1892

Gitans.

Voilà comment on appelait ces gens du voyage qui semblaient à l'écart de la communauté mortelle traditionnelle. J'aurais pu paniquer, mais honnêtement, je n'y connaissais rien et eux semblaient en savoir bien plus que moi. C'était curieux, d'ailleurs. Ils me regardaient comme s'ils savaient, comme si ma nature réelle n'avait pas de secrets pour eux. Et j'avoue que bien emmitouflée dans une couverture, face au feu de camp légèrement couvert de la pluie par une haute bâche, cela me fichait la chaire de poule. Mais c'était surtout leur manière de me regarder. Froide. Hostile. Comme s'ils ne désiraient pas qu'un être telle que moi s'immisce dans leur vie et risque de faire des contrats à tout va pour mon simple plaisir; il n'y avait que la petite vieille qui me regardaient avec un peu de compréhension et de réel souci pour moi.

Elle m'a invitée à rester parmi eux, et si elle n'avait visiblement pas été à la tête du petit groupe, je crois que les autres n'étaient pas de cet avis et auraient fait un tollé du diable pour m'expulser de leurs terres. Comme j'allais l'apprendre, les gitans n'aimaient pas les étrangers, mais je pense qu'au fil des ans, ils se sont pris d'affection pour moi. J'étais la petite sœur, celle qui n'était pas née de leur sang mais qui faisait néanmoins partie de la famille. Il n'y avait que Maria qui savait que j'étais bien plus vieille que le clan entier réuni...

●±‡±●

Les années se sont écoulées sans le moindre souci. Enfin, pour nous. Le monde, lui, était en revanche plus que jamais en proie à la haine et à la douleur, à la guerre et à la méchanceté. Je préférais rester à l'écart au début, même si avant que je ne réalise vraiment dans quoi je m'engageais, j'étais enrôlée comme soignante dans divers organismes hospitaliers de la région. Je me suis même engagée militairement durant la Guerre, si fou que cela puisse paraître aux yeux du monde... Mais cela s'arrêtait là. Le reste du temps, je le passais en compagnie des gitans et de mes chevaux, avec lesquels je partageais une compréhension incroyable. Je mettais cette faculté sur le compte de ce que j'héritais de mon père, après tout je n'avais pas d'autre explications.

Je m'étais offert une nouvelle vie... Une nouvelle liberté...

test rp.

Un sifflement.

C'est tout ce qu'il m'avait fallu pour pouvoir attirer à moi l'aînée de mon troupeau de chevaux. L'aînée, et aussi -il fallait le dire- ma favorite. Je n'avais pas vraiment de préférence quant à la race, mais la couleur palomino de Tilly m'avait toujours fait craquer. A ce jour, elle était mon amie la plus fidèle et d'un certain côté, elle se vantait de pouvoir mener le groupe de plus jeune aussi bien que moi. Dans le fond, c'était son rôle un peu aussi, mais chut, je ne lui dirais jamais. Aujourd'hui, j'avais seulement besoin d'elle et elle ne se fit pas prier cette fois pour trotter de la lisière de la forêt jusqu'à moi. Le territoire que j'avais acquis au fil des années était grand, sans réelle frontière si ce n'était un large ruisseau en amont de la prairie et un dense bois à l'est. Lorsque j'ai vu Tilly accélérer comme si elle voulait arriver à moi plus rapidement, j'ai bien vite compris que ce n'était pas par désir personnel, mais bien parce qu'elle avait perçu que j'en avais besoin.

La Révélation venait d'avoir lieu.

Je savais qu'il était stupide de m'en inquiéter. Franchement, ça ne regardait que les hommes et les vampires, ces créatures de la nuit qui ne pouvaient causer plus d'horreur en moi que ce qui était déjà. Mais quand même, je craignais les temps à venir, je craignais que tout ne change de trop et dans cette vie nouvellement retrouvée, où j'avais réussi à dénicher mon écrin de paix, j'éprouvais la crainte irrévérencieuse de tout voir voler en éclat... Un coup de naseaux me fit valser en avant, pour flatter l'encolure de ma belle: ah! qu'elle profitait bien, hein? Après tout, quoi de mieux qu'un câlin pour me réconforter et en même temps, en savourer l'instant aussi... C'était une petite chipie et alors même que je pensais ça, elle s'ébroua et hennit doucement comme si elle voulait me fustiger d'avoir une pensée pareille. On ne pouvait pas se comprendre, comme dans une conversation et des mots. Non, nous, cela passait avec le ressenti et les émotions que l'une transmettait à l'autre. Heureusement, parce que si je devais l'entendre parler dans ma tête comme je suis sûre que mon père avait été en mesure de faire avant moi, je pense que je serais devenue dingue... Aouch. Elle a comprit, ça aussi...

En tout cas, un rire finit par s'échapper de mes lèvres. Définitivement ma meilleure amie... D'un mouvement souple je l'ai montée, me moquant bien d'être à cru sur son dos et je l'ai guidée au galop jusqu'au coin de verdure où traînaient les autres. Je devais en prendre quelques uns pour l'activité de tout à l'heure: un groupe de jeunes handicapés physiques allait venir et profiter d'une petite balade sur mes animaux. Mais là, pour l'instant, à entendre le vent siffler dans mes cheveux, à ressentir le souffle rapide de Tilly et sa puissance sauvage sous moi, je retrouvais un peu de cette liberté que je savais être mienne, quelle que soit la conséquence de cette Révélation. Mon univers était ici, avec eux et ceux qui m'avaient offert une famille... Le monde attendrait bien encore un peu, non??


famille.

Alyz ~ mère ~ Sidhe ~ Suivante de la Reine de la Cour d'Eté
Ailean ~ père ~ Fey Animorphe ~ Disparu - présumé décédé
Aucune fratrie connue