➽ date et lieu de naissance. En l'an 25 de notre ère, Rome ➽ nationalité. Italienne ➽ nom du sire. Je ne connaissais même pas son nom ➽ date de l'étreinte. J'avais un peu plus de trente ans, donc elle a eu lieu aux alentours de l'année 55 après la naissance du Christ. ➽ statut. Ancien. ➽ discipline. Augure ➽ camp. Aux côtés du Maître de la ville.➽ état civil. Bien que cela ne vous regarde pas... Non, en fait, ça ne vous regarde pas. ➽ lieu d'habitation. Midtown. ➽ métier. Libraire, artiste, conseiller d'Alessandro... Tout et rien à la fois.➽ étiquette qui vous est collée. Hum... J'ai bien peur de ne pas être la personne adéquate pour répondre à cette question... Pour obtenir votre réponse, il serait beaucoup plus intelligent de parcourir la ville et d'interroger quelques badauds.

Solitaire - Calme - Cultivé - Intelligent - Doux - Froid en apparence - Patient - Social - Protecteur - Observateur - Effacé - Sympathique - Exigeant - Compatissant - Sentimental - Romantique - Mondain - Artiste - Esthète - Mélomane - Loyal - Équitable - Indulgent - Sociable - Respectueux - Équilibré - Sceptique - Discret - Au sens de l'humour mésestimé.

Les miens me disent solitaire. Rien n'est plus vrai. Dans leur bouche, ce mot sonne comme une critique... Ma perception personnelle m'interdit de le voir comme tel. Je le prends comme un constat. Eux ne comprennent pas, ils ne le peuvent. Ils ignorent ce que c'est que de fouler la terre pendant près de deux millénaires, que de voir ses compagnons mourir, les uns après les autres... Les miens se targuent d'être immortels. C'est faux. Rien n'est plus illusoire que l'immortalité du vampire. Dans le cas contraire, pourquoi ne serions pas légion de mon âge ? Nous ne pouvons mourir de vieillesse, ou de maladie, mais nous sommes mortels... Et pour le pied de nez que nous faisons à la mort en bravant l'ordre naturel des choses, elle ne nous accueille que rarement avec le sourire... La sensiblerie m'a lassé. J'aime, mais sans attaches. Je ressens sur l'instant, sans plus y penser la nuit suivante. C'est devenu ma seule arme, mon seul bouclier contre la folie que provoque la douleur de la disparition, la douleur de l'absence d'un être cher. Je suis un survivant à l'Inquisition. Des centaines de mes compagnons sont morts durant cette sombre période... ce genre d'épreuve marque même les plus coriaces d'entre nous. En ce qui me concerne, elle m'a appris à relativiser ma propre condition. Ces massacres ont porté un coup terrible à mon égo, qui avait cru depuis ma transformation sans que je ne puisse l'arrêter. En ce sens, ce fut une bonne chose. Terrible, certes... Mais nécessaire.

Je n'en ai jamais voulu aux humains pour leur barbarie. Quelque part, elle explique celle dont font preuve les miens. Le propre de l'homme est de couvrir toutes les déviances, d'en créer de nouvelles qui n'ont pas cours dans le règne animal, parce que les autres animaux n'ont pas de point de vue rétrospectif de leur action, n'ont pas de mémoire ou de morale. Ce qui me fascine chez l'être humain, c'est cette possession de morale, ce désir pour beaucoup de faire le bien, et cette faculté à pouvoir lui tourner le dos, ou à la transformer comme ça les arrange... Ces créatures sont les hypocrites de toutes, mais... Je ne peux refréner les sentiments qui m'animent à son sujet. Elle se renouvelle sans cesse, innove... Elle est fragile, incohérente, spontanée... La spontanéité se perd chez nous. C'est ce que je préfère chez l'être humain, juste après la peau douce, le parfum et le corps chaud des femmes !

Ah les femmes... Je ne comprendrai jamais pourquoi les hommes se sont mis dans la tête qu'elles étaient un sexe faible. Certes, elles ne possèdent pas de force physique supérieure à celle de l'homme, mais elles ont tellement d'autres forces que les hommes n'ont pas... Une femme endure la douleur de l'enfantement, vit et ressent avec plus d'intensité que ne le fera jamais un homme... Elles sont ma faiblesse, je l'avoue. Blondes, brunes ou rousses, minces ou rondes... Ma qualité d'esthète me permet de toutes les apprécier à leur juste valeur, autant pour leurs yeux que pour leurs formes. A l'exception de Lorenzo, chez qui je cherchais à capter, vainement, l'étincelle de vie, ce sont les femmes que j'ai le plus peint. Nues, toujours, ou presque. J'aime les choses épurée, la simplicité, et rien n'est plus simple qu'un corps nu, personne n'est plus humble à aucun moment qu'à celui où il s'expose, vulnérable. Cette vulnérabilité me touche, en particulier chez les femmes qui sont si pudiques. Leurs joues rosissent, elles détournent le regard... Certaines rêvent, pour occuper leur esprit pendant la réalisation de la peinture, que le peintre finira par les coucher sur le sofa du décor et par leur faire l'amour, les doigts encore souillés d'ocre, de rouge ou de bleu venant écrire sur leur peau... Sans jamais n'en rien avouer. Pour certaines parce que c'est cliché, et donc que ça ne leur correspond pas, pour d'autres... Parce qu'elles n'ont pas le moindre espoir que cela arrive en vrai, alors pourquoi rêver à l'impossible ? Même si c'est le propre des rêves, le pragmatisme n'est jamais loin.

Et au moins, avec les femmes, il est rare de parler de politique. Ce domaine est dominé par les hommes, de tous temps bedonnants et particulièrement contents d'eux-mêmes, ce qui explique en grande partie la raison pour laquelle je n'ai jamais aimé cela. C'est une place inhospitalière où chacun pense d'abord à soit avant de penser à la communauté, comme c'est censé se passer. Un univers où écouter l'autre est surfait, où l'on est persuadé d'avoir la science infuse et la réponse divine... La vérité, c'est que les politiciens me rendent malade. Je n'ai jamais voulu participer à leur mascarade, m'en suis toujours tenu éloigné, et ai observé, observe toujours... J'observe, j'apprends. Je dresse des schémas, des généralités, qui me permettent de ne pas reproduire les erreurs de certains. Je couple mon expérience personnelle à celle de mes semblables. C'est fort de ceci que j'ai proposé mon aide à Lorenzo. Parce qu'il m'importe autant que s'il était mon infant, donc par souci de protection. Les dirigeants de son acabit, si je me fie à mon expérience, meurent souvent de façon tragique. Je désire lui éviter cela, et puisqu'il est maître vampire, peut-être aura-t-il besoin, à un moment ou à un autre, de mes conseils. Mon calme a toujours su compenser son impulsivité.



Même si les apparences ne jouent pas en ma faveur, je suis quelqu'un de sociable, j'aime beaucoup sortir et voir du monde, et le jeu de la séduction est un de mes passe-temps favoris. Il n'est donc pas rare que je passe mes nuits au milieu d'évènements mondains (j'aime la classe et l'élégance apparentes de ces manifestations). Toutefois, ayant ma propre librairie, j'y reste souvent au calme. c'est un endroit où je me sens chez moi, où l'air est saturé de l'odeur du papier, du cuir... J'ai beaucoup d'ouvrages, certains très anciens mais... C'est surtout un plaisir coupable. Je me cache sous le couvert de l'enseigne "librairie" alors que si je pouvais, je ne vendrai aucun de mes livres! Certaines pièces m'ont demandé des siècles de recherche (littéralement) alors... J'ai quelques habitués pourtant. Je ne sais pas si c'est l'ambiance qui les séduit, ou autre, ils n'achètent pas (ce qui explique pourquoi je les tolère), mais viennent se poser avec moi dans mes vieux canapés, et on lit et/ou on discute. Un peu comme un club de lecture confidentiel. J'aime bien offrir un café à ceux qui ont de la conversation. Pour moi, une soirée réussie peut aussi bien être à parader dans les galas au bras d'une jolie femme qu'à parler littérature avec le prof de philo de la fac.

Et enfin, parfois... Je me rends jusqu'à Alessandro pour l'entretenir de la bonne marche de la ville. J'essaie de ne pas rendre ces visites trop fréquentes, bien que sa compagnie me manque cruellement parfois, je crains surtout qu'il ne finisse par se lasser et décide sur un coup de tête de se passer de mes conseils... Qui plus est, sa musique agresse mes sens. Ils sont bien plus développés que la moyenne, et certains sons, surtout lorsqu'ils sont inattendus, déchirent mes tympans. Je préfère l'ambiance feutré que confère le gramophone à la librairie.



Je ne crois pas avoir de tics ou de manies, si ce n'est être particulièrement tatillon en matière d'hygiène. Je ne suis pas un homme d'action, j'aime et je tiens à mon confort. Certains me trouveraient bourgeois, et ils auraient raison. Cependant, il faut comprendre que j'ai baigné toute ma vie, autant que ma non-vie, dans le luxe. Ce n'est pas à presque deux milles ans que je parviendrai à rectifier des habitudes nées d'une trop grande aisance, je le regrette... Aussi, j'aime le contact de tissus de prix, avoir un costume parfaitement taillé lorsque j'en ai besoin, que mes meubles ressemblent à quelque chose et ne pas trouver le même chez mon voisin... Qu'importe si je dois y mettre le prix. De ce fait, on m'attribue des goûts "rétro". C'est vrai. J'avoue que je préfère la ligne d'une Cadillac ou d'une Corvette Impala à celle des voitures actuelles. En revanche, je ne crois pas être snob. Il m'arrive de sortir en simple jean pour prendre l'air, ce genre de chose. Qui plus est, je n'ai pas pour habitude de m'étaler. Je suis quelqu'un de très discret, qui n'aime pas parler de lui à moins d'y être contraint et forcé... Principalement parce que si mon existence a connu de beaux moments, elle a surtout été jalonnée de malheurs. Ça n'est agréable pour personne d'entendre ce genre d'histoire, surtout pas pour moi de les raconter. Mais si d'aventure me prend le besoin de m'épancher, ce qui arrive parfois, je monte à mon atelier, pose une toile sur son trépied, et je peins. Je n'ennuie personne avec mes histoires, je me contente de les imager, de décharger le sentiment qu'elles me procurent sur l'instant. C'est une sorte d'exorcisme.



Je n'aime pas le sang animal, et je pense avoir gagné le droit, que ce soit par mes actions ou mon âge, de me repaître des humains. Cependant, je n'y prends pas un plaisir barbare. Je n'aime pas la chasse, n'ai jamais aimé cela, et préfère une étreinte voluptueuse assortie d'une morsure consentie à un viol du corps et de l'esprit. La faim m'a tiraillé des siècles durant... Elle a fait de moi un esclave, une bête tout juste assez consciente de ses actes pour être à même de choisir ses victimes, et préférer des criminels, la fange humaine, aux innocents. Maintenant qu'elle me laisse un peu de répit, j'en profite pour essayer de la dompter, ne plus la laisser m'enchaîner, et m'octroyer le droit d'épargner mes victimes, mais surtout... De les choisir.



Je suis un disciple de l'Augure, ce que je garde jalousement pour moi, n'ayant recours aux dons que cette discipline me confère qu'en cas de nécessité. Il m'a fallu... Plusieurs siècles pour en maîtriser les différents niveaux, principalement parce que je n'ai pas eu la chance d'être épaulé par mon Sire. Le premier niveau a longtemps été une torture. Je vivais reclus, la moindre lumière me rendait presque aveugle, le moindre son faisait saigner mes oreilles... J'ai eu l'impression de devenir fou, mes sens étaient continuellement agressés, je ne pouvais parler avec personne, même le plus doux des murmures sonnait comme un cri directement à mon oreille. Et puis, avec le temps, un par un, je les ai domptés. D'abord la vue, j'ai appris à jouer de mes pupilles comme un chef d'orchestre dirige ses compositions d'instruments, puis l'odorat, le toucher, le goût... L'ouïe m'a posé plus de problèmes, mais je l'ai finalement maîtrisée à son tour.

J'avais retrouvé un semblant de vie sociale quand j'ai atteins le second niveau de ma discipline. Il m'a laissé pantois. Voir les auras de ses interlocuteurs du jour au lendemain surprend énormément, croyez-moi... Ce niveau en revanche a été beaucoup plus facile à appréhender que le premier. A présent, je suis en mesure de voir ou de masquer les auras à ma guise. C'est un don très pratique, dont je me sers souvent pour m'aider à cerner les gens.

Le niveau trois m'a mis dans une transe ineffable. Comprenez-moi, l'histoire me passionne... Alors figurez-vous l'excitation qu'a pu me procurer me découvrir capable de voir le passé d'un objet rien qu'en le touchant? Ça n'était pas raisonnable du tout, mais j'ai été tellement empressé que je me suis rué, souvent sans autorisation, chez des tiers réputés pour posséder des reliques, ou même dans les églises, afin de toucher lesdites reliques... Parfois, l'expérience me coupait un souffle déjà enfui depuis longtemps. Parfois... Parfois je m'empressais de partir, hilare parce que ce qu'ils prenaient pour une relique était loiiiin d'en être une! Cette période de ma vie a été assez sombre, au bout d'un certain temps, je me suis mis à peiner à faire la différence entre présent et passé. J'étais écartelé entre différentes époques... J'ai cru que ma tête allait exploser. Maintenant, je sais me montrer raisonnable et parce que j'ai un bagage culturel appréciable, je n'ai souvent plus besoin de contact pour reconnaître un objet dit "d'époque" d'un objet qui ne l'est pas.

Le niveau quatre... A été un calvaire. Je m'étais amusé, baladé, avec les niveaux deux et trois, il fallait bien que le suivant me donne du fil à retordre. Les bourdes se sont enchaînées. Soit j'ai communiqué sans le vouloir des choses que je n'aurai pas dû, soit je captais des choses que je n'aurais absolument pas dû... Ça a été un véritable drame que l'apprentissage de la télépathie. Moi qui suis d'un naturel discret, je me suis retrouvé à exposer à toute une assemblée le fond de ma pensée, portée à cet instant sur la si belle paire de seins de l'une de mes condisciples... Heureusement qu'il m'était physiquement impossible de rougir. Les invités ont pris pour beaucoup ceci comme une illusion collective, voire comme leurs propres pensées. Les autres... Et bien, ils se sont moqués. Normal. Je suis toujours très prudent avec la télépathie. C'est un don pratique, mais qui réserve des retours de manivelle très douloureux.

Quant à la projection psychique... Je préfère garder le silence sur la façon dont j'ai acquis cette capacité. Chacun ses secrets. Sachez simplement que le voyage psychique est une chose qui m'est possible.



La révélation m'a emballé, m'a plongé dans un état d'excitation tel que je ne saurai le décrire, j'en voyais l'utopie de ma fenêtre, mais maintenant... Elle aurait quelque peu tendance à me laisser sceptique aussi. Comprenez-moi, j'aime énormément l'être humain, mais je sais de quoi il est capable, et autant le meilleur donne envie, autant... Nos propres déviances, à nous, les vampires, ne sont que le reflet de celles que nous possédions déjà en étant humain, ne sont que leur expression, leur exacerbation... Le propre de l'homme est de tuer ce qui lui fait peur. La ménagère chasse l'araignée, dans les films récents, les américains chassent les aliens agressifs... C'est la nature humaine. Et la révélation expose à leur vue une créature qu'ils ont appris à redouter, et à aimer d'une façon complètement paradoxale, depuis des siècles... C'est un pas important, une démarche osée, mais pour qui, comme moi, a vécu l'Inquisition... A un goût doux-amer. Et, malheureusement, j'ai bien peur que les évènements récents n'achèvent de tuer mon enthousiasme, et d'éveiller ma méfiance...



Je n'aime pas m'exposer, c'est donc quelque chose que je ne montre jamais à personne, même si parfois lors de moments d'intimité, il arrive qu'on le remarque, mais j'ai été marqué au fer rouge sur la plante de mon pied droit. Les lettres SPQR, qui signifient "Senatus Populusque Romanus", ou "Le Sénat et le peuple romain", ont été le cadeau d'arrivé qui m'a été fait lorsque mon père m'a envoyé à l'école militaire, comme le lui demandait sa condition de Sénateur. Cette marque est indélébile, et quelque part, j'en suis heureux. Elle me rappelle d'où je viens. Mais elle est suffisante à mes yeux, je ne tiens pas à acquérir d'autres distinctions.

Je suis né à Rome, il y a un peu moins de deux milles ans. C'était un monde radicalement différent, dont vous n'avez fait qu'effleurer toutes les subtilités, via les témoignages et les vestiges retrouvés par vos archéologues. Au moment de ma naissance, Rome était le centre du monde, était un empire expansionniste qui faisait trembler toutes les civilisations de l'Atlantique à la mer Égée. Et à la tête de ce peuple toujours à la recherche de nouveaux fédérés, il y avait des hommes de haute naissance, des hommes comme mon père. C'était un homme éclairé, intransigeant, mais juste. Il voyait clair dans l'hypocrisie de ses confrères, et parvenait à tirer son épingle du jeu, à survivre et à faire fructifier son affaire, car il était exempt de certains scrupules. Mon père s'adonnait au chantage, à la manipulation, à la traîtrise... Pour son bien, pour le mien... Car si Rome a été construite sur des idéaux louables, son cœur n'a pas résisté bien longtemps à la corruption. Incroyablement intelligent, mon père savait lire rapidement en ses confrères, deviner où se situaient leurs failles et frappait avant d'être frappé, usait de leurs déviances contre eux. Dans le monde de ma naissance, la corruption n'était pas le seul fléau. Il régnait aussi une certaine atmosphère perverse dissimulée sous un masque d'honorabilité... Le christianisme n'était pas encore né. L'Empire romain était encore polythéiste et honorait ses Dieux par des orgies. Les consuls étaient débauchés, les sénateurs bouffis d'orgueil... Mon père était un anaconda dans un nid de petites couleuvres. Il avait la force de s'y tailler une place, ce qui n'était pas mon cas, et il s'en est très vite rendu compte.

Il m'a bien élevé. Il m'a appris à choisir par moi-même, a développé mon libre-arbitre, mon esprit critique, ma morale. Il espérait pour moi un avenir moins sombre que le sien. Je suis ce que je suis grâce à lui, même s'il n'était pas infaillible. Il m'a orienté, quand j'ai eu l'âge, vers une carrière militaire. Il aspirait à ce que je me taille une place à mon tour, dans un milieu à ses yeux plus sain que le Sénat. Malheureusement vous savez... L'herbe est toujours plus verte de l'autre côté de la barrière. Mon père ignorait que, soldat ou sénateur, le combat était le même. Il fallait marcher sur les autres pour prendre de la hauteur, et mon intégrité me l'a toujours interdit. Je n'ai pas et n'ai jamais eu l'esprit de compétition. Et ne suis pas un sportif. Mon expérience dans l'armée a été catastrophique. Quand il est devenu plus qu'évident que je n'étais pas fait pour ça, mes arguments combinés à ceux de mon supérieur, un ami de mon père, ont eu raison de l'entêtement de celui-ci et il m'a fait revenir à la maison. Puisqu'il était évident que je ne brillerai ni dans le domaine militaire, ni en tant que politicien, je me suis retranché derrière la seule chose que j'aie jamais vraiment aimé: l'histoire, les langues, la religion... Ma culture s'accroissant, je suis devenu une référence en la matière, et à défaut d'occuper un siège au Sénat, je leur servais d'ambassadeur, la diplomatie que j'avais toujours manifesté aidant, voire de traducteur. Mon père mourut peu de temps après que je fus rapatrié, et je devins propriétaire de son domaine et de ses terres. Malgré le vide que sa mort laissa, ma vie était au mieux. Elle n'était pas parfaite, mais elle me convenait et j'envisageais, alors que j'approchais de la trentaine d'années, à me marier.

Hélas, des barbares anéantirent les défenses de l'Empire, traçant un chemin jusqu'à la tête du serpent, à savoir : Rome. La ville fut attaquée, saccagée, pillée, les femmes violées puis tuées, ou réduites en esclavage, comme le voulait la coutume. Le domaine de mon père se situait sur les hauteurs, un peu en retrait du cœur de la ville. Nous espérions, mes gens et moi, pouvoir fuir avant qu'ils ne parviennent jusqu'à nous, nous n’eûmes pas cette chance. Un groupuscule s'était détaché du gros de la troupe et avait fait irruption chez nous. J'étais dans mon bureau, tentant de trier au plus vite les documents que je devais absolument sauver, prendre avec moi, de ceux que je pouvais laisser sur place, condamner à la destruction. Ils ne m'ont pas laissé une seule chance. Ils ont défoncé les lourdes portes de bois précieux qui nous séparaient, mon entravé et mon contraint à les suivre. Mes gens quant à eux ont tous été massacrés. Cette nuit là, j'ai tout perdu. Mes amis, mes terres, ma vie, mon humanité... Ils m'ont tout pris. J'ai été transformé en vampire non pas dans l'intimité d'une chambre par une quelconque créature sortie tout droit de mes fantasmes, mais par un homme qui semblait à peine conscient de ce qu'il faisait, esclave de ces barbares. Ils l'ont tué juste après que son office eut été terminé. Le vampirisime n'a absolument rien de romantique. Je pris la fuite.

La suite de mon éternité est comme une vidéo que l'on se passe en boucle, inlassablement. J'ai erré, rencontré des millions de personnes, en ai aimé beaucoup. D'une façon générale, j'aime l'humain et j'ai adoré vivre parmi ses semblables pendant toutes ses années. Que ce soient les pires représentants de l'espèce ou les meilleurs, je suis fasciné de constater comme ils sont semblables et différents. Avec eux, mon éternité m'a semblé plus courte. Au final, très peu de mes semblables ont trouvé grâce à mes yeux. Il n'y en a que peu dont je tolère la compagnie, et encore moins qui me voient la rechercher. Parmi ces exceptions, on trouve cependant Alessandro et Lorenzo. Le premier Maître de la ville, ce qui ne m'étonne guère mais... Me fais tiquer tout de même, le second jumeau du premier. Ces deux-là, on peut dire qu'ils mouvementent mon existence... Enfin, depuis le temps, je me suis rendu compte que je ne peux les forcer en rien, ni l'un, ni l'autre, et que je dois me contenter d'attendre qu'ils viennent me chercher. Ça ne me dérange pas, je suis patient. Leur arrogance cependant m'est plus problématique. Je préfère la mettre sur le compte de la jeunesse, et espérer qu'elle s'amenuise avec le temps. Après tout, Alessandro est la raison de ma venue à Shaveport, même si les choses n'ont pas toujours été au beau fixe entre nous. En fait, à l'heure actuelle, je suis d'avantage préoccupé par le fait que quelqu'un, dont j'ignore l'identité, s'amuse à récupérer tous les tableaux que j'ai faits représentant Alessandro. Ça me perturbe. Bon, je l'admets, mon orgueil d'artiste est flatté mais... Je suis aussi très préoccupé par ce cas. Ce pourrait aussi bien être une groupie de lui qu'une personne cherchant à l'atteindre, bien que j'ignore comment il ou elle pourrait s'y prendre via de bêtes peintures... C'est un point à creuser.



« Ely ? Ely, vous êtes là ? » Peu après que la sonnette accrochée à la porte de la librairie Books & Stuff, la voie claire et haute d'une femme résonna parmi les hautes et longues étagères pleines à craquer de bouquins poussiéreux en tous genres. Elle s'appelait Hera, était de taille moyenne, avait de longs cheveux couleur chocolat et sentait cette odeur si particulière de pain d'épice, qu'elle se plaisait à cuisiner pour ses enfants de temps à autres. Son divorce l'avait chassée de chez elle, de la maison qu'elle avait occupée pendant un peu plus de quinze ans dans les beaux quartiers de Shreveport, et conduite à louer un loft dans le quartier de Midtown. C'était par hasard, alors qu'elle avait perçu un filon de lumière filtrer à travers des vitres noires de crasse, qu'elle avait découvert la librairie d'Elisius, ainsi que son singulier gérant. Auparavant, elle n'avait jamais rencontré quelqu'un qui était moins intéressé par le profit que lui. Lorsqu'elle était entrée, il était en plein débat avec ce qu'elle avait déduit être un fan des extra-terrestres, et l'avait trouvé agrippé à un lourd ouvrage, à son corps défendant, comme si sa vie en dépendait alors que l'autre voulait le lui acheter. « Vous n'y connaissez rien en latin, vous devrez me passer sur le corps pour avoir ce livre, je vous préviens ! Bas les pattes, espèce de grosse barrique mal éduquée ! » Et à l'autre, qui faisait deux fois la taille (en large) d'Elisius, d'essayer de le lui arracher des bras « Vous êtes libraire ! Votre rôle est de vendre des livres, et je VEUX ce livre ! » Cependant, une chose était étrange. Le fana de science fiction avait beau tirer à en suer sur l'objet de sa convoitise, malgré son peu de force apparent, Ely ne bougeait pas d'un pouce. Qui plus est, le charisme qui émanait depuis malgré son air outré d'en venir aux mains avec quelqu'un ne l'abusèrent pas longtemps. Hera devina bien vite quelle était la nature du libraire. Seulement, au lieu de prendre la fuite, elle s'était contentée de toussoter, mettant ainsi fin à cette ridicule parodie de négoce en retenant l'attention du UFOlogue, et avait argumenté. « Je crois que vous feriez mieux de ne pas le contrarier. S'il refuse de vous vendre cet ouvrage et bien... Prenez les références, et allez l'acheter ailleurs. Ou faîtes-lui une publicité déplorable. Mais vous ne pouvez pas le forcez à vous le vendre s'il ne le désire pas, j'en ai peur. » Le bas de la bouche du vampire s'était affaissé, de surprise, alors que l'autre s'était mis à grogner des insanités. Elisius avait ensuite froncé les sourcils, et attendu que la porte claque sur son encombrant client pour relâcher, d'un iota seulement, la poigne qu'il conservait sur le livre en latin.

« Et bien... Merci. » S'il avait pu rougir, le vampire presque bi-millénaire ne se serait pas fait prier. Se faire secourir par une femme... Et une humaine qui plus est ! C'était charmant, absolument charmant. Il n'eut pas l'air embarrassé plus que quelques secondes, et reposa délicatement le gros livre sur son étagère, avant d'avancer d'un pas énergique, le sourire aux lèvres et la main tendue, vers la mère de famille. C'était une coutume humaine qu'il avait vu se répandre et se développer, et avec laquelle il n'avait plus tant de réserve que ses comparses, alors il lui serra, aussi chaleureusement que possible compte-tenu de sa chaleur corporelle personnelle, la main. « Je vous remercie infiniment. Votre intervention m'a sorti d'un bien vilain pétrin. Me permettriez-vous de vous offrir un café ? » Et voilà, elle avait accepté, et de là était née une amitié et une complicité dans laquelle Ely trouve énormément de plaisir et de satisfaction. Hera étant une artiste également, c'est très agréable que de s'asseoir avec elle et d'évoquer les différents peintres à leur goût, d'argumenter lorsqu'ils ne sont pas d'accord, et le vampire apprécie tout particulièrement chez elle sa façon de s'émerveiller lorsqu'il lui présente une pièce de collection qui le mérite. Elle est une de ses habitués préférés. C'est pourquoi, après qu'elle fut entrée et l'ait appelée, Ely s'était empressé de descendre de son échelle, celle qui lui permettait d'atteindre les étagères les plus hautes de ses nombreuses bibliothèques, et de la rejoindre, le sourire aux lèvres. « Bonsoir Hera. Comment allez-vous ? » « Bien, merci. Et vous ? » Comme toujours, le sourire du vampire s'élargit. « En forme pour quelqu'un de mon âge ! » Elle avait ri. Une fois, et une seule, elle lui avait demandé quel âge il avait. Il lui avait répondu, évasif, que sa naissance avait précédé de longtemps l'invention de l'imprimerie. Depuis, elle ne voulait plus savoir, parce que ça la mettait mal à l'aise, mais riait tout de même à ses blagues. Hera était très bien élevée. « Je suis venue pour vous inviter à un vernissage. C'est ce soir, de l'autre côté de la ville. Accepteriez-vous de m'y accompagner ? » A l'instant où elle vit les yeux au bleu limpide de son interlocuteur se voiler de tristesse, elle sut que sa réponse serait négative, aussi ne fut-elle pas surprise de l'entendre répondre « Non, je regrette. J'aurai beaucoup aimé, mais j'ai un rendez-vous ce soir qui ne saurait être annulé ou reporté. Cependant, je vous assure qu'à la prochaine occasion, je vous inviterai moi-même. » Et il lui sourit, avec tellement de sincérité, qu'elle accepta, lui rendit son sourire et prit sur elle de masquer sa déception jusqu'à ce qu'elle soit à deux rues de la librairie. Elisius quant à lui avait à peine attendu que la porte se referme pour achever ce qu'il avait entrepris avant d'être interrompu par Hera, gagna l'appartement qui surplombait son commerce, troqua son jean, son tee-shirt et sa chemise pour un costume à la taille impeccable et une dizaine de minutes plus tard, s'engouffrait dans un taxi. Aujourd'hui, il verrait Alessandro. Le tout serait de rentrer un peu avant qu'Alekseï ne revienne.



Il n'y a pas grand chose à en dire. Ma mère est morte lorsque j'étais enfant (c'était il y a une éternité), quant à mon père... A quelques années près, il en va de même.

Il n'y a plus que quelques personnes que je considère encore de ma famille. Alessandro, bien sûr, que j'ai tendance à considérer comme mon propre infant; son frère, Lorenzo, que j'apprécie énormément également... Et bien sûr, Alekseï. Il est le seul membre de la famille Romanov que j'ai pu "sauver" de la révolution russe. Il est comme mon fils. Je ne suis pas aveugle cependant, je suis très à même de voir ses défauts, le danger qu'il peut représenter... Mais Alekseï est ce qui se rapproche le plus d'une famille pour moi, plus encore qu'Alessandro, alors quoiqu'il arrive, je le protégerai. Peu importe ce que cela me coûtera.

➽ personnage inventé/scénarii/prédéfini ? Prédéfini ➽ pseudonyme. PsychoDuck ➽ âge. 22 ans ➽ code du règlement. Et bien il ne manque plus que le thème musical de Dracula, prince des ténèbres (et des Carpates accessoirement) et je crois qu'on pourra commencer.
Cadeau: :') ➽ avis général à propos du forum.Plutôt très cool. ➽ avatar utilisé. Misha Collins