NEW-YORK - AVRIL 2004
C’est un pas à peine audible, un élan prit, le corps s’envole, et retombe de l’autre côté du gouffre. Un gouffre, oui, l’espace entre deux toits, une personne normale aurait grandement hésitée avant de sauter, mais Canaan n’est pas une personne normale, et son agresseur la poursuit. Tu n’existes pas, tu dois être invisible, et on ne doit sentir ta présence qu’une fois la Mort à tes côtés.La voix de son père raisonne dans sa tête, et elle accélère. Elle peut se rendre invisible, elle le doit, mais son odeur est tenace, elle commence à avoir chaud, un peu de sueur perle le long de son dos, alors qu’il est la, si près, et tellement rapide, beaucoup trop. Il va l’attraper, il aurait déjà pu, mais il joue avec elle et la petite souris ne peut que courir. Pourtant, elle n’a pas peur. La peur émousse ta lame, fait trembler ton bras, te fais rater ta cible. Tu n’existes plus, quand tu veux tuer, tu es ailleurs, une autre disait son père en corrigeant sa posture, alors qu’il l’entraînait à tirer sur le terrain vague à trois kilomètres de chez eux, avec son fusil d’élite, et des balles empruntées à l’armée. Lieutenant du commando spécial, des sniper, l’élite des hommes, des machines à tuer. Concentre toi, si tu veux vivre ! Elle n’aimait pas beaucoup les armes, avant le départ de son père pour la quatrième fois à la guerre. Puis on lui a renvoyé son cadavre, et elle a compris le sens de ses mots. Cours, cours, elle doit courir plus vite, et elle pousse dans ses retranchements. Cela fait plus d’une demi-heure que l’adrénaline la maintient debout malgré la douleur lancinante qu’elle sent grimper de son flanc. Cela aussi, permet au vampire de suivre sa trace. Elle doit s’arrêter pour panser sa blessure, mais elle ne peut pas. Si elle arrête de courir, elle meurt. Alors elle continue. Elle bifurque sur la droite, et saute encore entre deux immeubles. Le second est plus bas, la réception plus rude, mais Canaan a été entraînée, Canaan y arrive. La douleur n’est qu’une sensation, si tu y prêtes attention, elle te terrassera, alors ignore la autant que tu le peux. Cette phrase venait du meilleur ami de son père, le Colonel Albright, qui l’avait prise sous son aile à la mort de celui-ci. Elle avait quatorze ans, et la condition physique pour entrer dans l’armée, dans les forces spéciales. Plus tu commences tôt ma ptite, plus tu seras meilleure. De fait, son père l’y avait mise à sept ans, malgré les protestations de sa mère, qui jugeait le traitement trop dur, la psychologie de l’enfant trop fragile. Mais il fallait la dresser, essayer de tempérer son mauvais caractère. Il fallait qu’elle prenne sur elle, qu’elle fasse au moins semblant Elle aimait son père, oui…Et sans lui, elle aurait eu une vie morne. Elle pouvait lui dire merci, merci d’avoir fait d’une Elena une Canaan, et merci au Colonel pour avoir achevé le travail, merci à l’armée, merci à tous. Merci, oui, dernière pensée : Merci.
Le vampire l’a rattrapée, il la talonne, et son sourire affamé fait sentir à la jeune fille qu’elle arrivera bientôt au terme de sa vie. Il prend son élan, et veut se jeter sur elle. Elle saute, sur le côté, mais trébuche et tombe. Il se rattrape lui aussi, il la toise de haut. « Je vais te manger, petite fille. » Il sait à qui il à affaire, elle a essayé de le tuer, mais il savait qu’elle serait la, il savait qu’on voulait sa peau, et il lui avait tendu un piège. Elle s’en était tirée de justesse, mais la, elle ne pouvait plus rien. Corps à corps avec un vampire ? Perdu d’avance. Rien n’est jamais perdu, bas-toi jusqu’au bout. Oui…Elle était trop tenace pour se laisser prendre sans rien dire. Elle le laissa approcher, s’agenouiller en bloquant ses deux jambes. Il ferma les yeux, pour humer l’air, et sans doute, l’odeur de son sang. « Comment une petite fille humaine court-elle si vite ? Fascinant…Je t’ai pris pour une sorcière en te voyant. » La méprise, les gens la font souvent, car les gens oublient que l’espèce humaine a aussi son élite, qui peuvent passer pour pire que des monstres, dont on ne parle pas, qu’on craint, parce qu’ils représentent ce que n’importe qui pourrait devenir. Des machines, entraînées à tuer. « Les gens se trompent sans arrêt. » répond-elle, et le vampire avance son torse, la forçant à se coucher tout à fais. « La chasse t’a excitée ? » murmure-t-il, et elle sent son membre dur contre sa cuisse, à travers son pantalon de cuir. « Tu veux voir ? » elle susurre, et il glousse. On dirait un enfant possédé. Il remonte sa main le long de sa cuisse, elle aussi, porte un pantalon en cuir. Cuir confortable, cuir des assassins, ils sont de la même engeance. « Qui veux ma mort ? » Elle secoue la tête. « Il vient de trop loin, et c’est un adversaire trop grand. » Elle le voit tiquer, peut-être prend-t-il l’évidence pour une insulte. « Et ne suis-je pas trop grand pour toi ? Pourtant, tu m’as pris en chasse. » Elle hausse les épaules, la main du vampire remonte sur sa hanche, et son doigt va se perdre dans la blessure. Elle grimace à peine. La douleur n’est qu’une sensation la phrase martèle dans son crâne. « Je voulais voir qui m’avais piqué mes contrats dans l’Organisatsya, rien de plus. » Il arque un sourcil : « [color =darkred]Tu me titilles depuis si longtemps pour simplement ça ? Des contrats ?[/color] » Il n’a pas l’air d’y croire, et il a baissé sa garde, un peu trop. Canaan attrape le poignard d’argent qu’elle porte à son avant bras, il glisse dans sa main, et va frotter contre la chair du cou du vampire. Une fumée âcre s’élève. « Et de la curiosité. Désormais j’ai vu. » Elle sent une pression contre son pull, elle baisse les yeux une seconde. Un poignard menace de lui percer le ventre. « Tu veux savoir qui est le plus rapide de nous deux, petite fille ? » susurre-t-il à son oreille, et c’est au tour de Canaan de sourire. « Allons y. » Un éclair, une douleur, du sang qui gicle. Le sien. Elle baisse les yeux, le vampire l’a plantée, et seul un filet de sang coule de sa gorge. Il lui a brisé le poignet. Elle sourit. « Fils de pute. » dit-elle simplement, et elle essaie de se relever, sans y arriver. Le vampire se lèche les doigts, et passe sa langue sur ses lèvres pâles. « Si tu as de la chance, quelqu’un te trouvera au lever du soleil, auquel cas…Agonise lentement, petite fille, et retiens la leçon. On n’attaque pas un prince sans en payer le prix. » Un rire naît dans sa poitrine, elle s’esclaffe, et un peu de sang coule de sa bouche. « Depuis quand les vampires sont princes de quoi que ce soit ? » Il la regarde, une seconde, puis se retourne. « Depuis quand les petites filles jouent avec des flingues ? » Il se laisse tomber au bord du toit, et disparaît dans les ténèbres.


L’univers entier était noir et, par moment, elle distinguait des ombres colorées. Il lui semblait que son père était la, et lui souriait, alors qu’il n’était que cadavre et poussière depuis l’année de ses quatorze ans. Il lui semblait que sa petite sœur lui tenait fermement la main, mais elle était loin de New-York, très loin. Il lui semblait que sa mère la prenait dans ses bras, mais de la mousse blanchâtre se mit bientôt à couler de ses lèvres, symbole de son overdose médicamenteuse après la mort de leur père. Il lui semblait que sa vie entière défilait, la musique de l’enterrement de son père, les coups de feu tirés, le drapeau remit, plié soigneusement, Albright et son entraînement, ses missions pour l’armée jusqu’à encore récemment, avant qu’elle ne claque la porte, pour trouver un semblant de liberté, et son nom, qui commençait à sortir de l’ombre, pour prendre la forme d’un cauchemar. Canaan, Canaan, son pseudonyme, elle, Canaan…« Restez avec nous mademoiselle ! Merde, elle va faire un arrêt ! » Une voix lointaine, elle se laisse porter, alors que tout son corps est en feu. Elle se souvient des ordres qu’on lui a donné, des ordres, toujours des ordres, et sans son père, son mauvais tempérament a refais surface, oui, il aura fallu du temps, mais elle est revenue, terrible, et envoyait se faire voir ceux qui entendaient la commander, problème avec l’autorité, on se serait débarrassé d’elle avant si elle n’avait pas été aussi utile. Sauf que c’était fini, et si elle se plaisait à penser qu’elle avait claqué la porte –et elle l’avait fais en sortant- on l’avait bel et bien virée. Pour ça, qu’elle s’était lancée à l’assaut d’un vampire de plus de quatre cent ans ? Désespoir ? Envie de mourir ? Car que faire, quand on a vingt quatre ans, et que depuis toute petite on n’a appris qu’à tirer, tuer, survivre, et bien sur lire, écrire et compter, mais si elle a finit le lycée, c’est sans y mettre une seule fois les pieds. Elle ne sait rien fait d’autres de ses dix doigts, que de tuer, et ne veut rien faire d’autre, elle sait qu’elle deviendrait folle, serait malheureuse. « Trois, deux, un, dégagez ! » Son corps entier se soulève, le tracé reste désespérément plat. Mourir est la solution ? Oui, peut-être que ça l’est, et peut-être qu’elle a chassé le vampire pour cela, mourir. Elle est si lâche ? Comme ma mère, lâche, elle m’a abandonnée…Et Sarah aussi. Sarah… Le visage dégoulinant de larmes, du haut de ses neuf ans, la gamine brune avait pleuré pendant des jours entiers à la fois son père, mais aussi sa mère. Devait-elle pleurer sa sœur ? Elle, elle avait un avenir, et sentirait, si Canaan disparaissait. Oh elle l’apprendrait peut-être, ou peut-être comprendrait-elle en ne recevant pas de coup de téléphone le mois suivant. Ou en voyant sa photo dans le journal, si d’avanture on voulait l’identifier. L’armée…Elle devait encore être dans les dossiers militaires. Une recherche ADN, et on saurait. Malheur…« Trois, deux, un, dégagez ! » Elle ne pouvait pas mourir, en réalité, c’était stupide. Mourir comme ça, jamais. Pas si bêtement, pas maintenant. Elle devait continuer, pour…Quoi ? Sarah ? Oui, mais elle ne pourrait pas simplement redevenir une personne normale, pas après avoir vu tout ce qu’elle avait vu, pas après être passé par tout cela…Non. Vivre…En étant encore une tueuse ? Mais libre, cette fois, libre…Libre…« Trois, deux, un… » Bip….Bip…Bip…Le médecin essuie la sueur qui perle sur son front et remet les palettes en place. « On l’emmène au bloc. » Sa conscience lui échappe, elle sent confusément les choses, et elle se met à rêver. Elle rêve des gens qu’elle a rencontré, sa vie durant, et des victimes qu’elle a tué. Elle se souvient de cet homme, ce terroriste, qu’elle a du abattre a mille deux cent septante six mètres de distance, à travers une vitre. Elle revoit son œil exploser alors que la balle le tue sur le coup et qu’il s’écroule au milieu de sa réunion, provoquant la panique parmi les autres talibans. Elle se souvient de ce chef d’état, dont le gouvernement voulait la disparition, elle revoyait sa photo, et celle de ses deux enfants aujourd’hui orphelins. Elle se souvient de chaque détente pressée, de chaque œil percé, de chaque mouvement pour tuer, et elle se souvient même de la sensation de froid qui l’envahit, elle s’est détachée de tout. Elle se souvient de sa première Cess, c’était un loup-garou, et elle l’a abattu de loin, alors qu’il se nourrissait sous sa forme animale d’un daim. Puis elle a essayé les vampires, quelques petits, souvent, c’était un entraînement imposé par Albright, puis la, ce vampire, qui l’avait envoyé à l’hôpital, c’était son secret, sa tentative, et elle aurait du lui dire merci, de l’avoir remis sur le droit chemin. Si elle le retrouve, elle y pensera. Il faudra bien qu’elle le tue un jour. Elle se souvient aussi de ses partenaires, des soldats avec qui elle s’est battue, du type qu’on appelait la Nouille parce qu’il ne mangeait que ça, de Lebrack, de Tenissen, d’Edwards, qui avait claqué la porte avant elle pour devenir mercenaire. Elle se souvenait de tous les noms, de tous les visages, sa mémoire absolue la tourmente même dans l’inconscience. Elle n’est pas la, pas vraiment, elle est ailleurs et ici. Elle pense, elle revit sa propre existence, et elle comprend ce à quoi elle est destinée. Elle n’est pas une psychopathe, pas un monstre, non, elle nettoie le monde, elle fait justice… A sa façon.


QUANTICO - VIRGINIE - ETE 2009
Elle se tenait debout derrière un arbre. Appuyée presque de façon négligée, il fallait voir dans le noir pour sentir la tension dans son corps. Le regard fixé sur la fenêtre, elle regardait l’ombre s’activer dans la cuisine, et l’eau couler à travers la fenêtre ouverte. Il faisait chaud, ce soir la, et une petite brise charriait les cheveux bruns de Canaan. Elle entendait la voix d’un enfant, ce qui lui arracha un sourire. Tranquillement posée, elle savait, elle attendait son heure, patiente. Regardant la lune, le temps lui sembla perdre son cours, jusqu’à ce que la voix retentisse. « Depuis quand es-tu la ? » Canaan ne prit pas la peine de se retourner. « Un moment. » répondit-elle simplement. Et elle entendit un bruit métallique. Le couvercle de la poubelle qui s’ouvre, et qui se referme. « Tu veux entrer ? Adam est couché. » Elle acquiesce et suit sa sœur dans la maison. Une belle maison, celle de leur enfance, léguée à l’aînée, mais que Canaan avait laissé à sa sœur et au petit. Désormais, Adam avait presque quatre ans. Quatre ans…Elle ne l’avait pas vu grandir, juste naître, et n’avait pas été à son baptême, ni à son premier jour de classe. Parfois, elle l’apercevait, mais à ses yeux, elle n’était rien, car elle n’existait pas. Et c’était mieux ainsi. Elle ne voulait pas le toucher, l’entraîner dans sa spirale. Adam…« Tu étais où, pendant tout ce temps ? » Sarah s’abaissa pour attraper une bouteille de whisky dans le fond d’une armoire, et versa un verre à sa sœur, puis un à elle-même. « Quelque part. Tu n’as pas besoin d’avoir les détails. » Elle vit les doigts de sa sœur se crisper autour du verre. « Pourquoi tu viens me voir, si c’est pour ne rien me dire ? Tu m’appelles…Tous les deux mois, voir moins, tu me laisses sans savoir si tu es morte ou vivante, et quand je te vois, tu as de nouvelles cicatrices, et tu portes ces maudites…Choses. » Elle désigna d’un signe de tête ses armes, l’air dégoûtée. Si la mort de leur père avait convaincu Canaan sur l’utilité vitale des armes à feu, c’était devenu le cauchemar de Sarah, et elle comprenait, ça oui. « Tu n’es pas obligée de vivre comme ça, Elena. » lui dit-elle tout bas et elle ne répondit pas tout de suite, perdue dans la contemplation du liquide. « Qui veut d’un assassin pour femme, à part un autre assassin ? » La discussion, toujours la même. Elle sait comment ça va se finir. « Mais c’est fini l’armée, bon sang c’est terminé ! Je ne sais pas…Pas ce que tu fais, pas comment tu parviens à…A m’aider, d’où tu sors ce fric, dans quel genre de trucs tu trempes, mais tu n’es pas obligé de vivre armée, tu pourrais…Revenir ici, et rester avec nous. » Un pâle sourire s’étire sur les lèvres de la tueuse. « Tu ne sais pas ce que tu dis. Si je reste, quelqu’un finira par venir, et vous paierez cher ta générosité, tous les deux. » Sarah secoue la tête, las, en apparence. « Personne ne te poursuit, personne ne veut te tuer, bon sang tu es juste…Un soldat qui a vu des trucs horribles, et je comprends que tu sois paranoïaque Elena mais… » Bien sur, voilà, elle était un soldat, car jamais elle n’avait dis à sa sœur ce qu’on lui avait fais faire, jamais elle ne lui avait dis quel monstre elle pouvait être, ni qu’elle était désormais une tueuse à gage, bardée de cicatrices, qui s’en prend aux humains comme aux monstres, qu’un vampire a failli tué, qu’un autre s’est amusé a torturé, qu’elle a une demi douzaine de contrat sur sa tête dans le milieu, qu’elle exécute souvent des gens pour la mafia, qu’elle soit russe, italienne, chinoise, colombienne, peu importe, tant qu’ils avaient de quoi payer. Elle n’avait rien dis, parce qu’elle avait peur, oui peur, que Sarah la déteste et la voit elle aussi comme un monstre, qu’elle lui ferme sa porte, qu’elle la renie. « Tu pourrais au moins être la comme une tante, puisque tu as renoncé a être sa mère. » Voilà. La discussion s’arrêtait toujours la, Canaan vidait d’un trait son verre et se levait, ce qu’elle fit, mais Sarah prit les devants. « Dis moi où tu étais, Elena ! » Elena baissa les yeux, et c’est Canaan qui les releva, froide, détachée, malgré la douleur. Elle avait envie, oui, mais ne pouvait pas, non. Adam n’aurait pas du exister, jamais du exister, il était une erreur de jugement, un acte irréfléchi, une négation trop longue, elle avait nié sa grossesse jusqu’au septième mois, avait accouchée de façon prématurée, et avait appelé sa sœur, mit son nom sur le certificat. Adam était le fils de Sarah Riddle, pas d’Elena…Et de père inconnu. Le fils de Sarah, pas le sien, jamais le sien, elle avait trop peur qu’il devienne comme elle, et même si c’est dans son sang, elle avait espoir que l’éducation de sa sœur le sauve du chemin tout tracé, et que peut-être il échapperait à ce qui lui pend au nez.
Et pour ça, elle ne doit pas être sa mère. Alors elle regarde sa sœur, froide, détachée, comme si elle allait la tuer mais ne s’en souciait pas. « Tu fuis encore… » murmura Sarah, qui était peut-être la seule à pouvoir soutenir son regard quand il était ainsi. Elle lui lâcha le bruit, et recula d’un pas. « Va-t’en. » Canaan acquiesce, et se dirige vers la sortie, en déposant un numéro sur la table. « Si tu as besoin. » Sarah ne répond pas. Les ténèbres enveloppent l’ombre de la meurtrière, et elle entend la porte se refermer. Ses yeux se lèvent vers la chambre d’enfant, et elle sent un regard se poser sur elle. La, derrière la fenêtre, ses propres yeux la regarde. Si elle avait été Elena, sans doute les larmes qui lui brûlaient les yeux auraient-elles coulé.



HÔTEL MITEUX - DE NOS JOURS
« T’a entendu les infos? » demanda Edward à l’autre bout du fil, et elle poussa un soupir, le téléphone collé à l’oreille, alors qu’elle remontait son arme. « Tout le monde a entendu les infos. » Qui ne lest avait pas entendu, en même temps ? « Ca parle plus que de cette ville, Shreveport par ci, Shreveport par la, ça grouille de bestioles, des gens se font tuer tous les jours, personne ne bouge, et les sangsues sont en train de se taper sur la gueule. Et ‘paraît que ya de juteux contrats à prendre, des deux côtés. » Canaan hausse les épaules, avant de se rappeler qu’il ne pouvait pas la voir. « T’es fauché au point de courir après les offres ? » demanda-t-elle, avant de coincer un chiffon jadis blanc entre ses dents pour emboîter les deux parties de son Glock 19. « Non, mais je m’ennuie, vraiment…A croire que tous les bons morceaux ont migré dans cette ville de tarés. » Elle tendit le bras vers sa boîte de balles en argent. « Patience, ça va revenir. » Elle les mit une à une dans le chargeur. « Ouais mais quand ? Je tiens plus en place, faut que je bouge ou je vais tuer quelqu’un pour du beurre…Et tu sais bien que je n’aime pas faire ça pour du beurre. » Elle fit un signe de tête, elle comprenait. Tuer pour du beurre manque de sens, il faut une raison, et le manque n’en est pas une, auquel cas on ne vaut pas mieux qu’un psychopathe. Elle termina de mettre les balles en place et, ne fois son chargeur plein, l’emboîta dans son arme. Le tout fit un petit clic. « T’es sur un coup ? » demanda-t-il, reconnaissant le bruit entre mille. « Ouaip. » Elle souffla sur le canon de son arme, et la déposa à côté de sa jumelle. « T’a pas de place pour moi ? T’es où ? » Elle sourit. « A Shreveport, pourquoi ? » Avant de raccrocher et de se lever, glissant ses armes dans leur holster, une à l’épaule, une à la hanche, ses deux couteaux sur les avants bras, et un sac remplit d’armes dans un coin de sa chambre d’hôtel qu’elle prit pour remettre dans le coffre de sa chevrolet impala noire. Elle allait avoir du boulot pour un sacré bon moment…
Elle devait décidément une fière chandelle à ce vampire.