Le silence est d'or, la parole est d'argent ; un des nombreux préceptes qui ont bercé mon enfance. Je n'ai jamais été bavarde. Que ce soit pour alimenter une conversation, ou bien demander l'heure, mon interlocuteur comprenait bien qu'il ne pourrait m'arracher un mot. Éternellement vide -ce qui est le mot compte tenu de ma condition de vie-, je demeure stoïque à tous les aléas de la vie. On m'a trop souvent reproché mon absence de réactions, mon manque de tendresse ou mon mutisme perpétuel. Je détourne le regard, agacé. Mon visage reste lisse, ne se plisse pas. Et je laisse mon esprit vagabonder. Je suis rêveuse, et cela m'a toujours valu des problèmes. A l'époque, mes parents me pensaient « simplette » comme les médecins le disaient ; cette maladie n'avait pas encore de nom, mais on pensait que j'avais le syndrome de l'autisme. Effroyablement silencieuse, je restais cependant très minutieuse dans ce que j'entreprenais. J'observais, je calculais, j'anticipais et j'agissais en fonction de ce qui se présentait à moi. J'ai conservé cette capacité, je ne parle peut-être pas, mais ce que vous dites ne tombe pas dans l'oreille d'un sourd. Je me devais d'être raffinée, vous comprenez, j'étais issue d'une famille bourgeoise, le protocole exigeait que je devais suivre des règles bien spécifiques. Sourire, illuminer mon visage, saluer, bien me tenir lors des réceptions mondaines. Tout ce quotidien était mon quotidien. Je parle beaucoup de mon passé, mais ce que je suis à présent découle de mon passé. Je demeure à jamais l'essence de ce que j'étais il y a deux cent ans. Je n'aime pas le bruit, j'aime les endroits calmes comme les bibliothèques, les parcs et les autres plaisirs simples de la vie. M'allonger à l'ombre dans un parc, sous un arbre pour faire la sieste. J'aime la solitude, je suis introvertie, je ne fais pas souvent le premier pas. Mon silence me plait, et qu'il déplaise à certains ne me fâche guère. Je n'aime rien, je n'ai peur de rien -ou du moins, pas à ma connaissance-, je ne demande rien. Je me complais dans ma bulle imperméable et infranchissable. Je n'accorde ma confiance à personne. Je ne m'accroche à personne. Je suis de ceux qui se plaisent à penser que je resterai à jamais indomptée, que ma volonté propre suffira à me mener là où je le souhaite, et que je n'ai besoin de personne ; je ne cherche l'admiration et l'affection de personne, je poursuis mon chemin vers cette perfection à laquelle j'aspire ; je parais froide, moqueuse, méprisante ; Je ne ris pas, ne souris que pour m'amuser aux dépends des autres ; je suis aussi fière qu'un chat, si ce n'est pour cette part de mystère que je cultive bien involontairement, je ne suis pas de ceux dont on a envie de faire la connaissance, et jamais je ne vous y encouragerai.

En postulant en tant que Libraire au Breath's Writing, je pensais pouvoir exercer un métier en adéquation avec ma personnalité muette. Mais je me suis trompée. Mon employeur comprenant que j'étais ainsi, me demanda cependant de faire des efforts. Le nez légèrement plissé en une moue boudeuse très discrète, je devais donc me résoudre à parler. Non pas que je suis muette par traumatisme ou de naissance, mais parler est quelque chose qui m'ennuie. Je ne parle que par nécessité extrême, et encore parfois ... même dans les situations les plus critiques, on ne m'entend pas. J'adore cependant mon métier. Le simple fait de travailler dans une bibliothèque, le lieu m'épargnait donc des brouhaha intempestifs. Silence en bibliothèque. ; De plus, je lis sans grande conviction, je regarde les pièces de théâtres avec évasion, et je m'instruis seulement pour avoir quelque chose à faire. Il n'y a donc ni plaisir, ni envie, ni nécessité. Je le fais pour ne pas demeurer figée dans le temps. A vrai dire, je ne sais pas ce qu'est vivre sa vie. Je ne m'en plains pas, je hausse les épaules et repars à mes occupations. Je n'ai pas d'amis à proprement parlé, ils me considèrent eux peut-être comme telle, car je les écoute silencieusement se plaindre ou décharger leur malaise qui oppresse leur vie. Je ne juge pas, je ne contredis pas, je n'argumente pas, je ne fais qu'écouter. Est-ce donc frustrant pour eux ? Je m'en contrefiche, ils se confient à moi en connaissance de cause, même si pour être honnête, je ne comprend pas ce qu'ils estiment en moi qui puissent leur assurer je suis digne de confiance ? Je hausse les épaules, ce n'est pas mon problème, car après tout, je suis une tombe.

Je n'ai jamais su pourquoi Ania céda à ma supplique, mais elle me marqua. Cela peut vous paraître étrange, mais j'ai le sentiment morbide que nous sommes étroitement liées l'une à l'autre. Un lien plus fort que jamais, un lien de sang, un lien de chair. Mais ça, je ne le sais pas encore, et Ania semble ne pas vouloir m'en dire plus. Qui est-elle pour moi ? Mon âme soeur, mon amie, ma soeur, ma protectrice, ma confidente ? Je ne sais point, disons que notre relation semble assez neutre pour le moment. On a du mal à montrer nos sentiments l'une à l'autre. Et la seule fois où j'ai cru voir un semblant d'effroi sur son visage, j'étais en danger de mort. Elle a si peur que je meurs ? Pourquoi ? Dis le moi, Ania ...

La révélation. Certains dirons que ce fut une bénédiction, certains dirons que ce fut une malédiction. Moi, je ne pense rien. Avant ou après, cela m'est égale. J'ai toujours été pâle de nature, une jeune femme au teint blanc comme la neige, les lèvres rouges comme le sang, les yeux bleus comme le ciel. Avec cette révélation, on se méfie de ma condition. Ils ont raison de se méfier, ça m'encombre de leur présence qui m'est insupportable, de plus, ils ne se doutent pas de ma vrai condition. On pense que je suis un vampire, alors qu'il n'en est pas totalement vrai. Peut-être me trouverez vous misanthrope, je le suis un peu oui, et je le vis bien.

Je sais parler français, anglais, en raison de mes origines. Je cultive donc mes origines avec soin, en sachant cuisiner la gastronomie des deux pays, la culture, la langue etc.

On se penche, on admire et puis, on découvre. Quoi au juste ? Que l’image est l’image de la nature et je suis comme elle. Simple fruit de gestation. Une femme, parmi tant. Je suis différente des autres et pourtant nous savons tous que nous ne sommes différent que du masque que nous portons. Le mien est blanc et scintillant. Il est uniforme et m’englobe tel une sphère parfaite. En son centre, un sourire. Large et noir. Il te réconforte. A mes côtés tu te sens en sécurité. Et je souris de plus belle, étalant ma clairvoyance devant tes yeux égarés. C’est si bon. Je ne suis que la progéniture farouche issue de l'union d'une famille bourgeoise française et d'une richissime famille anglaise. Et on s’approche du miroir. Le masque devient translucide découvrant l’éclat de la banalité. Ils s’alignent de couleur pacifique. Ils portent chances cependant ma mère, elle aimait perdre ses yeux dans leur profondeur. Mes cheveux étaient d'un reflet brun et c’est pour cela qu’ils n'ont jamais changer de couleur. Elle m’aimait tant pour me préserver de cette banalité dont vous êtes tous victimes. Et j’ai grandis avec le regret d'avoir assisté à la mort de mes parents sur mes épaules, frêle et stupide croyante de la ravissante créature que Dieu m’offrait. Je l’ai convoité, ô oui et le fruit m’a consumé jusqu’à la folie. J’étais si petite, fragile et menue. Dieu, mais qu'ai-je donc fais ?

Le monde est une pièce mal distribuée. Certaines personnes ne devraient jamais avoir croisé notre chemin et pourtant, le destin en décide bien souvent autrement. D'ailleurs la majeure partie du temps, c'est grâce à ceux-ci que l'on apprend le plus, sur nous-même, sur tout. Que ce soit agréable ou pénible, ces personnes ne sont jamais là sans raison. C'est à nous de décider ce que l'on veut en tirer ou pas. Ennemi, ami, famille et amour riment avec mourir. Je suis morte d'une mort lente et douloureuse un certain 20 août, alors que j'allais sur mes dix neuf ans. J'ai agonisé dans une ruelle sombre et désaffectée pendant près d'une heure et demie avant de pousser son dernier soupir, pendant que mon assassin me vidait de mon sang et me fit boire le siens. C'est triste, mais c'est la vie. Enfin, la mort. Lithium. Je sombre dans les profondeurs des eaux froides. Je sais nager, oh que oui ma Brebis, mais les eaux peuvent s’avérer dangereuses. Je n’en avais pas conscience, et c’est à l’aube de ma vie que je l’ai compris. Le noir, le blanc, l’ombre, la lumière, la chaleur, le glacial, tous ses antagonismes font que le monde peut rester en parfaite harmonie, depuis la cécité de la vie. Parce que la neige tombe du ciel, où encore parce qu’on fait la guerre, nous vivons dans un équilibre cosmique perpétuellement renouvelable. Après tout qu’est-ce qu’est la vie ? Est-ce l’éternel renouvellement, un peu comme les saisons ? C'est une histoire très ancienne, issue d'un passé si lointain que plus personne ne s'en souviens. C'était le souvenir de la promesse originelle profanée. Le Paradis Perdu ... Éveillez-vous ! Soyez Maudit ! Vous êtes sur le point d'accomplir à nouveau les noirs desseins de Caïn, celui qui fut le premier tueur de l'humanité, et qui devint pécheur et damné de l'enfer. Vous êtes sur le point de reproduire la révolte de votre aïeul, celui qui était parmi les plus illustres dans le ciel. Écoutez les lamentations des êtres maudits ... Parce que Hysteria est ma Muse (eh oui, jeu de mots ♥), je m’enfonce dans les méandres et les vagues moulues de l’océan ..Pacifique ? Détrompez-vous mes agneaux, c’est l’Océan Anarchique.

Vous allez sûrement me prendre pour une imbécile, une timbrée ou qu’importe. Vous me prendrez sûrement pour ce que je ne suis pas. Constamment, dans ma vie, ce fut le cas. On me surestime. Me dote de qualités que je ne mérite certainement pas. On ne cesse de m’offrir de l’amour, sentiment que je ne mérites peut-être pas. Et il en fut ainsi depuis ma naissance. L’histoire qui va vous être conté n’est pas faites pour les âmes sensibles. Car mon Destin était déjà écrit, et je n’avais pourtant rien demandée. Je suis née dans ce monde cruel, qui m'avait tout pris, et qui ne comprenait pas. En effet, c’est bien beau de me demander de vous raconter l’histoire de ma vie, mais elle est malheureusement incomplète. Elle est comme un puzzle inachevé dans lequel il manque des pièces essentielles. Un trou dans mon être que jamais quiconque ne parvint à consolider. Venez, rejoignez-moi sous la vague déferlante de mon fleuve des ténèbres et buvez donc la tasse.

Quelle horreur, je crois bien que je meurs, que j'ai peur de cette raideur.
Quelle horreur je crois bien que je meurs, dans quelques heures
Dans quelques pleurs.

Il est temps que je cesse de cavaler. Et pourtant, je ne parviens à coupler ma volonté avec ma motricité pour stopper ma course et faire face à mon poursuivant. Je ne parvins pas à savoir pourquoi je le fuis, mais tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien. Car je crois savoir, alors qu’il n’en est rien. Je cours sans me retourner, ma respiration s’entrecoupe et là je suffoque. J’ai peur. Peur de lui faire face, et de devoir admettre certaines choses qui pourrait me mettre dans l’embarras. Le contrôle de moi-même est une aptitude que j’ai toujours développé depuis ma plus tendre enfance ? Non, plutôt mon adolescence si je ne m’abuse. Tout ça pour dire, que mon poursuiveur, mon assassin, mon bien aimé me pourchassait et c’était avec désespoir que je tentais d’échapper aux entraves de la mort.

Je me penche. Que vois-je ? Le reflet d'une âme damnée. Le regard sombre, dénué de quelconques sentiments. On dit que les yeux sont les fenêtres de l’âme : j'en conclus donc qu'à l'ascension de ma mort, la perte de mon âme a marqué mon trépas. L'eau glacée entre en contact avec le bout de mon nez fin, brusquant l'eau calme qui s'agite. Je pleure. Maman ; pourquoi suis-je si faible ? Alors que je ne me supporte plus, je repense à cette femme qui a souffert durant toute sa vie en me donnant naissance. C'est durant l'une de ses nombreuses nuits d'hiver, où la neige tombait à gros flocons que Deneve, ma mère, était lové dans son fauteuil à balançoire. Tourné face à la fenêtre, chantonnant une douce comptine, elle caressait son ventre volumineux caractéristique d'une jeune femme attendant un heureux événement. Visage serein et resplendissant, elle leva ses yeux perles et elle aperçu un magnifique rayon de Lune qui perça la noirceur de la nuit, éclairant ainsi la tombée de la neige. Frappée par ce contraste, la jeune femme souhaita une fille ténébreuse comme la nuit, blanche comme la neige et belle comme la Lune. C'est ainsi que je naquis, moi Astrid Shona Ludwig, un bambin qui ne demande pas à naître, mais qui naquit dans un monde qui ne me comprenait pas. Frappée par la bise d'un soir d'hiver, j'ai poussé mon premier cri pendant une tempête de neige, soit dans d'atroces conditions. Jolie bébé, ma mère fut soulagée lorsqu'elle me vit pour la première fois. C'est avec bonheur qu'elle me prit dans ses bras pour me réchauffer. Pourquoi ne m'en souviens-je donc pas ?

Mon enfance passa aussi rapidement qu'une plume s'échouant à la surface de l'eau ; dessinant des ondes circulaire venant troubler la planéité de l'eau en question. Devenant une jeune femme, je dus cotoyer les réceptions mondaines, afin de me présenter en tant que fille et jeune héritière de la société de mes parents. Une société de joaillerie, à l'époque, ce domaine professionnel était très demandé, raffiné et plaisait à la clientèle detenant un très fort capital. Porter un masque était mon quotidien, sourire pour plaire, rire pour satisfaire, faire la bise pour le respect ; tous ces codes étaient lassants pour moi, mais nécessaire pour mon rang social. J'étouffais lors de ces soirées, et juste un soir, je me suis eclipsée. Je n'avais jamais beaucoup réfléchie à la manière dont je mourrais mais je n'aurais pas imaginé que ça se passerait ainsi. Quelque part au loin, dans les tréfonds d'une rue macabre, une jeune femme hurla. On aurait dit que j'étais prise au piège d'un cauchemar terrifiant, un de ceux où l'on est forcé de fuir, de courir jusqu’à ce que les poumons donnent l'impression d'exploser, sans que l'on réussisse pourtant à bouger assez vite.

La nuit, un étendu de territoire sombres dans lequel on marche en pressant le pas, dans l'espoir de fuir les tueurs de l'âme qui nous pourchassent. Minuit, l'heure où les carillons sonnent pour annoncer le coucher au petits enfants. L'heure où le marchand de sable passe avec son sable à effet somnifère. Ou encore l'heure où Morphée accueille à bras ouverts les détenteurs de rêves, les passagers de son navire des songes. Elle était là, assise sous la lumière fébrile de la Lune, comme un princesse dans les reliures des livres, si attirante et pourtant hors d'atteinte, elle m'attendait depuis ma naissance. Mon marqueur, ma Ania. M'asseyant à ses côtés, elle tourna ses yeux sombre vers moi me scrutant avec neutralité. Elle déplaça ses doigts de façon à les entrelacer autour de mon cou. Je me concentrai. Il fallait que je dise quelque chose. D'une importance vitale. Très prudemment, si prudemment que ce geste-là fut décelable, je sortis mon bras droit de derrière mon dos et levai la main de son visage. Je m'interdis de songer à la couleur perle de ma peau sous les rayons de la nouvelle lune. Plantant mes yeux dans les siens, j'entendis ma propre voix pour la première fois :

- Sauve moi.

I dreamed I was missing ; You were so scared.

J'ai rêvé que j'étais perdue au tréfonds de la ville. Ania avait si peur. Je tentais de fuir quelque chose d'atroce, et elle, de me sauver de cette chose. Mais lorsqu'elle me retrouva, cette chose la tua.

Yesterday, I died ; Tomorrow's bleeding.

Ania me transforma car elle se voyait en moi, tout comme je vois en elle. Elle est la seule à qui je daigne délier mes lèvres pour lui adresser la parole. Je n'aime habituellement pas parlé, mais avec elle, tout est naturel. Je ne me force à rien, tout comme elle me force à rien. Elle m'est précieuse. Mon esprit se mourrait à chaque respiration, elle a aspiré ma part d'humanité, pour ainsi me figer à jamais dans le temps. Ainsi je demeurerai à jamais à ses côtés ...

Je suis fêlée. Sûrement folle, une psychopathe misanthrope. Sûrement. Mais vous. Vous n'êtes que des moutons. Des moutons sans importance dont le but est d'errer en se gratifiant de la présence d'autrui. L'humanisme est périmé. Vous n'auriez jamais dû naître, vous n'êtes là que pour user bêtement les ressources de la Terre. Qu'avance t-il à l'homme de faire cela, si cela n'est que de gâcher celle d'un autre ? Je suis différente. Oui. Différente. Vous, vous seriez prêts à me lapider. Car je ne suis pas comme vous. Alors, allez y. Lynchez moi, frappez moi, maltraitez moi. Mais, moi, je reste ce que je suis. Et malgré tout, je vous ignore. Tous autant que vous êtes, vampires, lycans, sorciers, nécromans. Je ne vous vois pas. Passez donc devant moi, vous resterez invisibles à mes yeux. C'est d'un naturel, et c'est la meilleure solution. Je ne vous aime pas, je n'aime pas le bruit, je n'aime pas votre présence. Ne me regardez pas, car je m'efface. Je ne suis que la transparence du décor, de la nature. J'aurai dû naitre caméléon, afin d'assortir ma peau avec l'environnement qui m'entoure, pour mieux me camoufler. Je vous intrigue ? Mais par pitié, passez votre chemin. Je ne suis pas une bête de foire, je ne suis que moi. Qu'est-ce qui peut vous donnez envie de m'adresser la parole ? Je ne vous répondrai pas, je ne daignerai même pas vous regardez. Sincèrement, allez vous en.

Cette révélation m'indiffère, vos réactions encore plus, mais vos actions m'agacent. Ne m'approchez pas, avec votre présence nauséabonde. Vous n'êtes qu'un ramassis d'ordures. Je n'ai pas de temps à perdre. Je demeure peut-être figé dans le temps, mais je n'aime pas le perdre, car le temps c'est de l'argent. Silence, je vous dis ! Nous sommes dans une bibliothèque, respectez donc ce lieu car ... Quoi ? Vous essayez d'impressionner cette blondasse ? Je m'en contrefous, ce lieu est un lieu de silence. De plus, sans paraître impolie, ce n'est pas de la culture de bas fonds qui vous permettra de faire l'amour à cette femme. Veuillez m'excuser, j'ai du travail, moi. Ah ? Vous partez déjà ? Bonne journée à vous.

Je vous hais, je vous haiiiis. Et pourtant, je suis condamnée sur cette Terre depuis deux cent ans, figée à l'âge de mes dix neuf ans. Ania refusa de m'ôter de la vie, elle m'enchaîna à elle. Si je m'étais écouté ce jour là, il y a deux cent ans, je lui aurai décoché un poing. Je hausse les épaules, je n'ai pas le temps à me laisser vaquer à des pensées absurdes. La révélation m'a légèrement étonnée. Bien que je ne me sentes pas concerner dedans, je ne m'en préoccupe pas plus que des humains. J'entretiens avec soin une banalité sordide, afin qu'on ne m'approche pas. Je suis simple, silencieuse, discrète, et je ne m'en porte pas plus mal.

Mon père et ma mère sont mort il y a plus d'un siècle et demi ; Deneve et Isaac Ludwig, anciennement Ludwic ,eurent une mort paisible. Ma mère était anglaise et mon père français. Ils se sont mariés sur le plan financier, ce fut donc un mariage arrangé. Ils ne s'aimaient pas au début, mais avec le temps, je suis née de leur amour. Ils détenaient le monopole sur le domaine de la joaillerie. Premier bijoutier d'Europe, ils venaient de s'implanter en Pologne, pays origine de mes ancêtres. Je n'ai pas de famille, en sachant que je demeure depuis près de deux siècle sur Terre. Je suis seule dans tous les sens du terme.