Identité
✤ Traits de caractères

« Y a-t-il une raison à sa folie ?
— Non. Il n'y en a pas. »

Âme scindée, déchirée entre l'enfance et une maturité écornée par l'absurde, Kanghwa s'égare sans cesse entre la réalité et les chimères nées de sa psyché. L'univers entier se déforme, se tord, se plie aux caprices de sa démence, mais la lucidité revient toujours, par à-coups, et, étonnamment, n'a jamais quitté sa figure ciselée dans le marbre. De prime abord, Kanghwa semble plus étrange que folle, et nombreux sont ceux lui accordant un semblant de sagesse, voire une clairvoyance qui frôlerait l'Augure. À croire qu'un Troisième Œil se serait ouvert à son Éveil.
La vérité, c'est que la Nature a pourvu Kanghwa d'un sens de l'observation acéré – et ce, depuis le tout début de sa vie. C'est une gamine perspicace. Ses yeux d'émail jaugent ses pairs par-dessus ses grimoires, constatent les fêlures, enregistrent les données, s'en repaissent en secret, les recrachent au besoin. La truffe au vent, l'œil perdu dans les recoins du monde, on la croit ailleurs, mais elle est bel et bien là. Quand ses prunelles scrutent l'invisible, quand des gloussements lui secouent le gosier, quand le gosier déverse des inepties... Kanghwa est là. Les esgourdes en quête de rumeurs et la cervelle ruminant les secrets, déliant la langue pour rapporter à ses aînés. Une comptine vibrant dans sa gorge délicate ou les lippes agitées de murmures incohérents. Un pied dans l'enfance. L'autre dans le monde adulte, dans les ténèbres de sa nature ; l'aspect manichéen de la vie n'a jamais eu de sens pour elle et lui octroie la cruauté candide des enfants. Tout est dans le jeu, tout est dans le paradoxe. À la fois femme et enfant, à la fois douce sauvage, Kanghwa peut, comme la mer, sembler aussi sereine que houleuse.

« I know what I look like.
— A weird, sad clown puppet ?
— I'm fine with that. »

Pantin, poupée ; la frontière est infime. L'air chétif de Kanghwa assure à ses aînés de pouvoir tirer ses ficelles, mais, si on peut jouer avec, nul ne la manipule. Sa vivacité d'esprit détonne avec son air morne. Et, sous ses airs stoïques, les méninges cogitent sans cesse. Comment aurait-elle su autrement glisser sur les ans, telle une anguille se faufilant des les mailles du filet ? La môme est adroite pour filer comme une ombre ; ingénieuse, même. Mais sous l'égide de sa démence, cette méfiance se mue en paranoïa et, autrefois, Kanghwa sombrait aisément dans la Frénésie. La confiance que lui portent ses pairs a alors été rompue. On la lorgne souvent, quand bien même son attachement à la Mascarade est tel que, lorsque des oreilles indiscrètes traînent, sa bouche se clôt aussitôt. Kanghwa devient une tombe. Rien ne pourrait extraire les secrets de ces mâchoires crispées, scellées.
Plus inqualifiable, insondable et mystérieuse qu'elle ne l'est habituellement ; son aura s'étiole et trouble plus qu'elle ne fascine.

« Madness you say! Do you fear me? Are you afraid of what I might do, of what I might say? What a fascinating reaction. »

✤ Occupations, manies, habitudes & goûts
C'est un animal nocturne à l'image de ses congénères ; à l'exception près que si elle rêverait la nuit, elle rêvasse encore le jour. Le museau frôlant le papier froid des magazines d'art, ou les pages jaunies d'un vieux roman ; la lecture est l'échappatoire la plus accessible à ses petites mains racées. Kanghwa ne fait aucune distinction entre un Thilou et le Petit Dragon et un Guerre et Paix ; tant que son esprit n'a pas les deux pieds dans le réel, la môme se contente de peu. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que les arts soient son obsession première ;  quels qu'ils soient. À son grand désarroi, ses pognes peuvent bien travailler la glaise et ses ongles s'user sur les cordes, aucun talent particulier ne s'en dégage. Tant pis. Kanghwa entasse des cahiers de coloriages et des feutres dans son sac-à-dos lapin, non plus pour percer dans le milieu qui l'attire, mais pour son propre plaisir. On la verra souvent, assise sur une marche, à massacrer les portraits de princesses Disney en les affublant d'yeux incandescents et de longues canines. Dodelinant du chef et fredonnant. Il y a toujours une voix qui lui murmure un air entêtant ; c'est comme un fond sonore qui, lorsqu'il est doux et étouffé, n'empêche pas de lui faire la conversation. Mais quand les violons montent et enivrent son esprit, Kanghwa écoute. L'œil toujours rivé sur les autres mais inébranlable, les sens saturés de voix intérieures et extérieures, et de la Bête, qui racle les parois de son crâne.

« Dieu merci, Harriet et le pater sont toujours présents. »

Harriet, c'est une étrange poupée de chiffon rapiécée, rembourrée de chrysanthèmes et de laurier. Kanghwa l'a trouvée dans les bras d'un sorcier mort dans des circonstances mystérieuses – ce qui ne l'a pas empêchée de récupérer cette horreur, trouvant dans ses yeux décousus et son rictus étrange une esthétique discutable. Certains avancent que Harriet est maudite, en dépit des plantes qui la composent. Peut être. Mais Kanghwa s'en fiche comme d'une guigne. Harriet est donc bringuebalée sans arrêt, accrochée à son sac et serrée par les bras minces de sa nouvelle propriétaire lorsque la Bête hurle. Quant à son géniteur humain, Kanghwa l'a exhumé et en a gardé le crâne pour une raison obscure – parfois, c'est à lui qu'elle s'adresse lorsqu'elle marmonne et glousse, a priori seule, ou conte mille et une histoires ou farces. Les fous aiment collectionner.

✤ Discipline
L'hypnose, la force, la vitesse, la télépathie, les sens décuplés ; Kanghwa les maîtrise à des degrés divers.
Issue d'un lignage peu puissant, la télépathie lui est quasi-inconnue – encore que son sens de l'observation, et sa discipline, lui permettent parfois de sonder les personnes l'entourant comme si elle en était doté. Et, si elle est plus forte qu'un humain, la jeune fille ne possède pas la robustesse qu'elle devrait avoir à son âge. Sa capacité à être une véritable anguille pallie ce manque de force ; Kanghwa fuit plutôt que de faire face.
Quant à l'hypnose, sa maîtrise est la plus commune possible. Kanghwa peut infléchir la volonté des humains lorsque ceux-ci sont réceptifs, et ne le fera que pour s'abreuver. Son ouïe demeure son sens le plus affûté, alors que son habileté à sentir la peur attire dangereusement sa Bête, prête à la plonger dans la Frénésie.
L'Aliénation est un legs de son Sire. L'abandon fut rude pour l'épanouissement de sa discipline mais, déjà profondément atteinte de tares psychiques, Kanghwa a acquis ses niveaux avec une rapidité déconcertante lorsqu'on lui offrit la possibilité de progresser. Comme un prodigue de la folie. Il y eut une longue période de stagnation jusqu'à ce qu'elle atteigne son deuxième niveau. Mais de nos jours, Kanghwa maîtrise presque parfaitement le troisième en considérant son âge. Sa fâcheuse tendance à la rêverie, et le risque accru que la Bête reprenne le contrôle, la restreint dans l'utilisation de sa discipline bien qu'elle la module avec talent.

✤ Convictions
Au fond, Kanghwa a peu de considération pour la Révélation et, si on lui poserait la question, elle hausserait probablement les épaules, avant de reprendre sa conversation avec une chimère que seule elle peut voir.
Le peu d'attention qu'elle a pour le monde se ressent parfaitement dans son rapport à la politique. Rien ne semble différent, puisque tout était déjà étrange ; et, si elle ne peut plus assouvir sa soif de sang pour les adolescents de son âge, Kanghwa s'accommode au True Blood en société, même si elle trouve « que c'est pas bon ». Avant, après ; la mort est la même. Aussi sombre et langoureuse qu'à son Éveil. Tant que Kanghwa ne finit pas cendres, peu de choses lui importent. Et, Révélation ou non, elle s'est toujours sentie en-dehors des problèmes de ses pairs, tel un Mathusalem trop jeune pour se retirer aux confins du monde.

✤ Signes particuliers
Souvent perçue comme la silhouette éthérée d'un esprit rôdant aux alentours, un air de poupée plus proche d'Annabelle que de Barbie ; les yeux vides, froids, et pourtant animés d'un drôle d'éclat dément, et le rictus souvent fiché aux lèvres charnues, murmurant trop d'inepties pour être ignorées.
Kanghwa, si on ne connaît pas son nom, on a son air fantasque imprimé sur la rétine.